Il n'y a pas qu'en Europe que le réveil russe préoccupe. Pour la première fois lundi, le ministère russe de la Défense a annoncé que son aviation avait effectué des patrouilles conjointes avec l'armée de l'air syrienne au-dessus du Golan syrien, le long de la frontière israélienne. L'opération incluait différents appareils, dont des chasseurs bombardiers et un appareil de surveillance, qui ont survolé le sud-ouest de la Syrie et la ligne de cessez-le-feu entre Israël et la Syrie. L'exercice a également comporté des simulations de frappes d'objectifs au sol. Ce n'est pas la première fois que la Russie fait acte de présence dans cette zone, mais jusqu'à présent, cela se limitait à des patrouilles terrestres. L'aviation russe est en revanche active dans d'autres régions de la Syrie. Elle a ainsi récemment bombardé des positions rebelles dans le secteur d'Idlib.
La Russie est présente en Syrie depuis 2015, où elle a répondu à l'appel du président Bashar al Assad pour l'aider à reprendre le contrôle de son territoire en proie à la guerre civile depuis dix ans. Depuis, c'est l'armée russe qui a la maitrise et le contrôle de l'espace aérien syrien. Ce qui avait conduit Israël à mettre en place un dispositif de coordination avec la Russie, afin de prévenir des accrochages ou des frappes accidentelles des appareils de Tsahal contre des positions ou des avions russes. Cela n'avait pas suffi à éviter un incident diplomatique entre Moscou et Jérusalem en 2018, quand la défense aérienne syrienne avait abattu par erreur un appareil militaire russe, tuant ses 15 membres d'équipage, en croyant tirer sur des chasseurs de Tsahal qui venaient de bombarder un objectif iranien près du port de Lattaquié.
Depuis, les relations se sont apaisées, mais Tsahal poursuit ses frappes en Syrie pour empêcher l'enracinement de l'Iran dans la région. Des opérations qui se sont même intensifiées au cours des derniers mois, y compris par deux raids contre le port de Lattaquié, qui visaient des chargements de missiles destinés au Hezbollah. Si la Russie laisse faire jusqu'à un certain point, c'est qu'elle y trouve aussi son intérêt : contrer la montée en puissance de l'Iran en Syrie qui lui fait ombrage. Ce qui ne l'empêche pas de prendre une part active dans les tirs de défense antimissiles contre les raids israéliens par l'usage de ses propres batteries ou de celles dont elle a équipé l'armée syrienne. Il est arrivé plus d'une fois que ce soit le ministère russe de la Défense à Moscou, qui annonce avoir intercepté des missiles israéliens au-dessus du territoire syrien.
Mais c'est donc la première fois que la Russie prend part à des patrouilles aériennes de l'armée syrienne si près de la frontière israélienne et qu'elle annonce de surcroit que ces opérations deviendront régulières. Il faut y voir un double message. D'abord la volonté russe de voir l'aviation d'Assad reprendre progressivement le contrôle de son espace aérien. Mais aussi un signal à destination d'Israël que ses opérations contre l'Iran ne doivent pas fragiliser le régime syrien, ni contrarier les intérêts de Moscou. Ce qui pourrait compliquer un peu plus la campagne entre les guerres que conduit Israël en Syrie contre l'avancée du régime de Téhéran.
Pascale Zonszain
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