C’est le choc dans ce milieu très fermé des écoles talmudiques en France . Pas moins de 16 responsables de cette école juive orthodoxe ont été placés en garde à vue, soupçonnés de dérives sectaires et de maltraitances sur une soixantaine d’élèves. Situé dans un domaine isolé du nord-est du département, l’établissement reclus accueille une soixantaine d’adolescents, âgés de plus de 12 ans, ainsi que des jeunes majeurs. Une centaine de gendarmes et des services de la préfecture République de Meaux ont donc mené des investigations dans la Yeshiva Beth Yossef (école talmudique) à Bussières lundi matin et interpellé les suspects. Des hommes (des rabbins) soupçonnés de maltraitances physique et psychologique envers leurs élèves, principalement des mineurs américains et israéliens, a annoncé la procureure de Meaux.
Selon le communiqué de presse de la procureur de Meaux Laureline Peyrefitte : "Cet établissement accueillerait de manière non déclarée de nombreux mineurs de nationalité américaine et israélienne ne parlant pas le français, dans des conditions abusives : enfermement, confiscation des documents d’identité, conditions de vie dégradées, actes de maltraitances, absence d’accès à l’éducation et aux soins, et sans possibilité de revenir dans leurs familles."
Les accusations sont graves et l’enquête va se poursuivre. Il faut savoir que l’enquête avait été ouverte en juillet des chefs de séquestration en bande organisée, violences aggravées, privation de soins et d’aliments, abus de faiblesse aggravé, a précisé Laureline Peyrefitte. "Les premiers éléments de l’enquête, notamment l’audition de mineurs en fugue ou d’anciens élèves de l’établissement, permettaient de confirmer ces suspicions de commission d’infractions", déclare la procureure.
La fameuse Yeshiva était même dans le viseur depuis juillet 2021 de la Mission Interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes)qui avait émis un signalement. En juillet , un interne a dénoncé les mauvais traitements et a accusé les responsables de l’école d'être violents, de servir de la nourriture périmée, ou encore de le priver de repas. Une enquête préliminaire avait alors été ouverte pour "violences aggravées."
Le même mois, un élève américain s’était échappé et avait trouvé refuge à l’ambassade américaine à Paris. De novembre à décembre d’autres élèves vont s’échapper de la Yeshiva. L’opération vise notamment à la mise en protection, l’audition et l’examen médical des mineurs, en lien avec l’aide sociale à l’enfance de la Seine-et-Marne.
Sur la page Facebook de la Yeshiva Beth Yossef, l’établissement a publié une photo de classe datant de 2014 sur laquelle apparaissent des jeunes baroukhim en costume et kippots encadrés par les responsables et enseignants.
Des vidéos de leurs vacances sont également disponibles sur le site internet de la Yeshiva. Sur la présentation on pouvait imaginer un établissement tranquille et propice au calme et à l’étude. Situé dans un domaine isolé du nord-est du département, l’établissement accueille 40 adolescents de plus de 12 ans, ainsi 22 jeunes majeurs. Implanté depuis une vingtaine d’années dans le département, l’établissement hors contrat n’est pas dans le circuit de l’Éducation nationale, a précisé la préfecture de Seine-et-Marne.
Mais le bâtiment logeant les mineurs fait également l’objet d’un arrêté de fermeture au public du fait de son état de délabrement, d’après la procureure.
Un peu d’histoire :
L’institution Ohr Yossef, dont dépend la Yeshiva Beth Yossef, a été fondée en 1948 au lendemain de la Shoah par le rabbin orthodoxe Gershon Liebman élève d’une grande Yeshiva de Russie depuis la première guerre mondiale. "Aujourd’hui, la yeshiva est fière de son succès et regroupe plus d’une centaine d’étudiants, venant du monde entier …Les élèves y approfondissent assidûment leurs connaissances thoraïques afin de devenir eux-mêmes, des Maîtres de la Torah", est-il écrit sur le site.
Cet endroit dispose de tout le nécessaire pour que chaque élève puisse vivre pleinement son judaïsme : Beth hamidrash, résidences étudiantes, yeshiva, mikvé maayan… Et bien évidement une équipe de Rabbanim dévouée et expérimentée qui fournit un enseignement de grande qualité. Tout élève, sans distinction, qui souhaite venir étudier et se renforcer au sein de notre yeshiva est le bienvenu. Nous avons tenter de joindre les responsables de l’institution et de la Yeshiva, en vain pour l’instant. Nous aurons d’autres informations dans la journée.
En attendant on a appris qu’en lien avec l’aide sociale à l’enfance, les élèves de l’école talmudique "ont été pris en charge dans une structure scolaire avec un internat pour les loger, assurer le couvert et que les inspecteurs puissent les entendre", a indiqué la préfecture.
On résume : l’enquête a été ouverte des chefs de séquestration en bande organisée, violences aggravées, privation de soins et d’aliments, abus de faiblesse aggravé . "Les premiers éléments de l’enquête, notamment l’audition de mineurs en fugue ou d’anciens élèves de l’établissement, permettaient de confirmer ces suspicions de commission d’infractions."
Michel Zerbib
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