Chers auditeurs, merci d’attacher vos ceintures: voici comment un manuel présente en classe terminale le sujet « Conflits et tentatives de paix au Proche Orient ».
« Sans tenir compte du plan de partage de la Palestine « proposée » (avec une faute d’orthographe sur « proposée », pauvre Education Nationale….) par l’Organisation des Nations Unies en 1947, David Ben Gourion proclame la naissance de l’Etat d’Israël le 14 mai 1948. Cette décision est à l’origine de cinq guerres israélo-arabes ».
Il s’agit des Editions Magnard.
Rappelons brièvement les faits. Un plan de partage, instituant dans la Palestine du Mandat britannique un état juif et un état arabe a été voté par l’Assemblée Générale de l’ONU le 29 novembre 1947. Il a été accepté par l’Agence juive, représentant officiel du sionisme, que présidait David Ben Gourion. Il a été rejeté aussi bien par le Haut Comité arabe présidé par Hadj Amin al Husseini que par la Ligue arabe. Le jour du départ britannique, le 14 mai 1948, Ben Gourion proclame la création de l’Etat d’Israel, comme prévu dans le plan de partage. C’est alors que les troupes des pays arabes voisins envahissent cet état, mais les combats avec les irréguliers arabes faisaient déjà rage depuis six mois. Inutile de rappeler ici la suite de l’histoire.
Ce qui impressionne, c’est la grossièreté du mensonge suivant lequel c’est David Ben Gourion qui n’a pas accepté le plan de partage de la Palestine. Je crois que même les manuels d’histoire palestiniens n’écrivent pas une telle énormité. C’est comme si on disait que la Pologne a attaqué l’Allemagne - ce que les nazis avaient d’ailleurs tenté de faire croire - et que cela a entrainé une guerre mondiale. Nul doute qu’une telle appréciation ne serait pas passée inaperçue.
Le reste du texte dresse un tableau à charge d’ Israël. C’est lui qui agresse à chaque conflit, profitant du soutien des Etats Unis, provoquant le ressentiment des arabes injustement spoliés. Mais la charge est plus subtile et une critique du texte point par point se perdrait dans les méandres d’une discussion de détail. Ce qui compte, c’est l’impression d’ensemble. Celle-ci est sans équivoque. Israël est illégitime et il importe de montrer que dès le début, il n’a pas respecté les décisions des Nations Unies.
Le livre de Magnard a généré une question écrite par le député Meyer Habib, en raison d’autres passages ou de photos qui à chaque fois présentaient Israël sous un prisme négatif. La réponse du ministère est venue huit mois plus tard, rejetant les critiques et insistant sur l’importance pédagogique d’instaurer ce qu’il appelle une « problématique » et sur la liberté des enseignants à cet égard, le corps des inspecteurs devant essentiellement vérifier que les programmes sont bien respectés.
Soit.
J’ose espérer néanmoins que le respect du programme n’est pas tout et que la vérité joue un petit rôle dans l’enseignement. Pour parler du système solaire, laisserait-on un livre de physique soutenir que la terre est plate?
Si un livre d’histoire édulcorait la Shoah, ne serait-il pas vite dénoncé, à très juste titre?
Alors pourquoi ce mépris de la vérité historique en ce qui concerne Israël? Nous sommes dans une période où le « Israël bashing » fait de nouveau feu de tout bois. A chaque fois, il s’agit d’organisations ou de militants unidirectionnels chez lesquels la détestation d’Israel est une seconde nature. En est-il de même ici et comment se fait-il qu’un tel texte n’ait pas été corrigé?
Au choix, militance, négligence, ignorance, indifférence, voire complaisance pour éviter des problèmes avec des élèves supposés a priori être anti-israéliens?
Les conséquences d’une telle manipulation ne sont pas négligeables. Elle suggère que dès sa création Israël s’est dressé contre la volonté des Nations Unies. Elle légitime l’indignation à son égard. Elle suscite la haine envers lui, cette haine qui structure en grande partie la flambée actuelle d’antisémitisme.
Les enseignants ont le choix de leurs manuels. Au vu de ce texte de Magnard, j’espère que son livre n’a pas été très populaire….
La liberté d’expression, c’est malheureusement souvent la liberté du mensonge. Mais ce mensonge ne devrait pas tenir de place dans un livre d’enseignement, qui forme la génération de demain et qui, ne l’oublions pas, est payé par les impôts des générations d’aujourd’hui.
Richard Prasquier
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