Les cris d’indignation tendent à remplacer le débat politique. Et ils sont, parfois, bien étranges, ces cris.
Sur Radio-J, invité par mon ami Frédéric Haziza, Yannick Jadot analyse la manière dont Eric Zemmour déculpabilise l’antisémitisme, en jouant de rôle de juif au service des antisémites.
C’est un fait, Zemmour, contre tous les historiens, ose prétendre que Pétain a protégé les juifs français, et il promet, entre autres choses l’abolition des lois Pleven et Gayssot. L’antisémitisme cessera donc de constituer un délit, pour redevenir une simple opinion, exprimée librement. La contestation de crime contre l’humanité, la profanation de la Shoah, le mensonge sur les chambres à gaz, pourront s’exprimer en toute liberté.
Les antisémites applaudissent. Les chevaux de retour de la droite païenne, Bruno Mégret et Jean-Yves Le Gallou, négationnistes militants, soutiennent activement la campagne Zemmour, où leurs émules occupent des postes de référents du parti Reconquête dans plusieurs régions. Les catholiques intégristes ne sont pas en reste, hostiles à l’abandon, par Jean XXIII et Jean-Paul II des dogmes antisémites de l’Église, ils sont à la fête quand leur candidat défini la France par une identité catholique, obligeant les autres religions au respect et à la discrétion.
La campagne d’Éric Zemmour est une déclaration de guerre à la France des Lumières, à celle de la Révolution française proclamant la liberté de tous les cultes, à celle de la République laïque séparant les églises de l’État. Cette France rebelle, qui, contre Pétain, sauva les deux tiers des juifs des France.
Mais, curieusement, ce sont les propos de Yannick Jadot qui suscitent l’indignation. Certes, Yannick Jadot se garde de combattre ouvertement les dérives des élus de son propre parti. Ceux de Strasbourg, qui n’ont pas jugé utile de marquer le 27 janvier, anniversaire de la libération d’Auschwitz et journée mondiale de la mémoire des génocides. Et tous ceux, qui au sein d’EELV, prônent le boycott d’Israël et propagent les thèses diffamatoires d’Amnésie Internationale. Non, ce n’est pas un lapsus, cette organisation a oublié qu’Israël est le seul pays de la région où les arabes disposent des droits civiques, participent à des élections libres, sont représentés au Parlement, au gouvernement et occupent des fonctions dans la magistrature. Oui je voudrais entendre Yannick Jadot condamner, aussi, la partialité antisémite du rapport d’Amnésie Internationale. Je voudrais l’entendre dénoncer fermement les complaisances d’une partie de la gauche et des écologistes envers le régime fasciste de Gaza, avec sa police religieuse et ses prisons où l’on torture les opposants. Je voudrais l’entendre exprimer sa solidarité avec les femmes d’Iran, qui luttent contre l’obligation du voile, je voudrais l’entendre parler de l’apartheid des pays de loi islamiste, qui prive les femmes et les minorités de droits civiques.
A titre personnel, je sais que Yannick Jadot n’a aucune complaisance envers les différentes formes d’antisémitisme, mais, investi d’une courte tête à la primaire des écologistes, il est prisonnier de son parti et Europe Écologie Les Verts souffre de « palestinite » aiguë.
Ainsi va la politique. Chacun voit d’abord l’antisémitisme de l’autre.
J’adhère totalement à la définition donnée par Yannick Jadot du juif de service des antisémites. La haine longtemps contenue par la force de la loi s’exprime, dans les manifs antivax notamment, elle se déchaîne sur les réseaux sociaux et suinte parfois dans les médias.
L’antisémitisme n’est malheureusement pas une exclusivité. Sa forme de gauche, l’antisionisme, est désormais ancrée dans les débris de l’électorat. Mais l’antisionisme ne rapporte pas, il a même puissamment contribué à la marginalisation d’une gauche qui cherchait son salut dans la radicalisation… A l’extrême droite, en revanche on rêve, depuis toujours, de rendre son honneur à l’antisémitisme, en faisant le chemin inverse de Georges Bernanos, qui avait rompu avec Maurras et l’Action Française, parce que cette pensée était déshonorée par Hitler…
La reconstruction de Maurras, et donc d’un antisémitisme honorable, est bien l’œuvre d’un juif de service.
Guy Konopnicki
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