Après les témoins, c'est au tour des proches des accusés d'être entendu hier après-midi pour le début de la 3e semaine du procès. Il s'est ouvert lundi 14 février à Paris pour quatre semaines d'audience devant la cour d'assises spéciale, cinq ans et demi après l'assassinat du père Jacques Hamel le 26 juillet 2016 dans son église près de Rouen (Seine-Maritime), par deux jeunes jihadistes - Adel Kermiche et Abdel Malik Petitjean - abattus par les forces de l'ordre.
Quatre hommes sont jugés, dont un grand absent, Rachid Kassim désigné comme l'instigateur de l'attentat, soupçonné d'avoir commandité cette attaque, présumé mort en Syrie. Les accusés présents dans le box : Yassine Sebaihia, Farid Khelil et Jean-Philippe Steven Jean Louis.
La mère du terroriste originaire de Saint-Étienne, a témoigné . Âgée de 59 ans, elle est professeur. Son fils a commencé à parler religion et faire ses prières en mars 2015. Il a commencé à reproché à ses parents leur pratique religieuse.
"On a commencé à s’inquiéter, on l’a mis en garde mais un jour sa sœur a découvert un plan pour se rendre en Syrie dans son téléphone", a-t-elle expliqué alors qu'Adel Kermiche tente par deux fois d’aller là-bas. Dans le cas de Kermiche , il faut reconnaitre que la famille a tenté des choses !
La mère a alerté le commissariat de Saint Étienne du Rouvray et elle était en contact régulier avec la commissaire. Les parents ont demandé une interdiction de sortie du territoire car il était encore mineur mais ça n’a pas empêché leur fils de partir.
Adel Kermiche a été retrouvé en Allemagne et son père est allé le chercher. Interrogé par la police, il est relâché. "On s’est retrouvé sans personne pour nous aider", a raconté sa mère. Son fils est reparti un mois et demi après.
Adel Kermiche est cette fois arrêté en Turquie. Devenu entre temps majeur, il est d’abord emprisonné en Suisse puis transféré à la maison d'arrêt de Fleury-Mérogis. Et de préciser : "Il a été incarcéré avec des personnes bien plus dangereuses que lui".
La mère d’Adel Kermiche en veut au maire (à l’époque) de Saint -Étienne-du-Rouvray Hubert Wulfranc qui, selon elle, avait promis d’aider le garçon à sa sortie de prison. Mais ils n’ont pas donné suite : "On s’est retrouvé seuls pour faire face à la radicalisation de mon fils et il est arrivé ce qui est arrivé." Et La mère du terroriste d'ajouter : "Je suis très peinée pour les parties civiles, j’aurais tellement voulu éviter ça".
"Les élus ne sont pas des éducateurs, ce ne sont pas les mairies qui déradicalisent" estime Hubert Wulfranc.
Le matin de l'attentat le 26 juillet 2016, c’est la commissaire de Saint-Étienne-du-Rouvray qui a appelé Mme Kermiche pour savoir si Adel était là. C’est ainsi qu’elle a constaté sa disparition. La famille a appris l’attentat par un journaliste qui a frappé à la porte du domicile.
La mère d’Adel Kermiche dit : "C’étaient mes couteaux de cuisine". Elle pense que l’attentat aurait pu être évité et espère avoir (avec ce procès) des informations des services de renseignement.
Car la mère d’Adel Kermiche a assuré "avoir tout fait" pour que ses enfants aient une bonne éducation. Les quatre aînés ont fait des études supérieures brillantes.
Adolescent, Adel Kermiche a été envoyé en institut thérapeutique. Il a aussi fait un séjour en hôpital psychiatrique pour des troubles graves du comportement. Avant sa radicalisation, il consommait de l’alcool et du cannabis. Il se décrivait comme "très naïf".
A la fin du témoignage de la mère d’Adel Kermiche , la sœur du père Hamel s'est levée pour s’asseoir à côté d’elle sur un banc dans la salle.
Il a commencé par dire qu’il n’a rien à dire mais a répondu aux questions du président. Il a expliqué qu’il était "un peu méchant" avec ce fils hyperactif : "Moi son père, je n’arrivais pas à le comprendre".
Tout à coup, il s’est effondré et a quitté la barre en disant "Je ne peux pas". Suspension de séance.
Après un gros quart d'heure de suspension, l'audience a repris. Et le père d’expliquer à la cour que
Quand il a vu Abdel Malik Petitjean (l'autre tueur) chez lui, il lui a demandé de partir. Son fils l'avait présenté comme un ancien copain de lycée. Il a entendu parler de l'attentat à l'église de Saint-Etienne-du-Rouvray à la radio au volant de son camion. Il a tout de suite pensé à son fils. Trop tard …
La mère et la petite amie de Yassine Sebaihia témoignent à leur tour en ce lundi 28 février. La mère de Yassine Sebaihia, a juré que son fils ne "serait jamais allé" à Saint-Etienne-du-Rouvray s'il avait "compris" les intentions des deux jihadistes.
Le Toulousain avait rejoint Adel Kermiche et Abdel-Malik Petitjean le 24 juillet 2016, avant de repartir dès le lendemain matin, veille de l'attentat. "Je pense qu'il était pas au courant, il n'avait pas compris" ce qu'ils préparaient. "Sinon il n'y serait jamais allé", a-t-elle déclaré.
Quand à la petite amie de Yassine Sebaihia, elle pensait qu’il partait faire un stage pour approfondir sa religion et il a rencontré "deux mecs qu’il a trouvé chelou" et l’ont laissé à l’écart.
L’avocate générale a demandé à la petite amie de Sebahia pourquoi il regardait des vidéos de propagande de l’EI extrêmement violentes. Défense : "Il a toujours été très curieux. Il regardait des vidéos de tout, comment fonctionne une voiture par exemple".
Michel Zerbib
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