Une enquêtrice Belge qui rit aux questions de la défense, la chronique de Michel Zerbib

France.

Une enquêtrice Belge qui rit aux questions de la défense, la chronique de Michel Zerbib
(Crédit : Twitter)

L’enquêtrice belge pensait tellement avoir apporté des éléments prouvant la présence d’accusés auprès des organisateurs des attentats. Cela n’a pas convaincu la défense dont les questions ont fini par la faire rire. On va raconter pourquoi.

Quand vous êtes dans la salle d’audience vous sentez entre les avocats de la défense et les témoins, le "jeu" des questions-réponses un rapport de force, sorte de bras-de-fer verbal. Surtout quand les éléments présentés par ces témoins mettent en difficulté les accusés. Dans la salle d’audience , c’est souvent une ambiance électrique.

Ce mercredi2 mars 2022, ce rapport de force a bien eu lieu entre des avocats de la défense et une enquêtrice de la police fédérale belge . Hier l’enquêtrice a ri de manière spontanée et sans que l’on sache si ces rires inattendus dans un tel procès étaient nerveux ou parce qu’elle trouvait bizarres les questions des avocats.

Car les faits présentés par l’enquêtrice peuvent apparaître accablants pour un certain nombre d’accusés. C’est le cas pour Ali El Haddad Asufi, incarcéré et jugé pour avoir été en contact régulier avec les frères El Bakraoui, les fers de lance de la cellule terroriste.

À partir de début octobre 2015, Ibrahim El Bakraoui se cache dans un studio à Etterbeek (commune de Bruxelles), au quatrième étage d’un immeuble.

Ce dernier y reçoit plusieurs visiteurs : Mohamed Bakkali, autre accusé du procès, et son frère Khalid El Bakraoui qui finira par s’y cacher également. Mais aussi Ali El Haddad Asufi à de nombreuses reprises. La preuve est indiscutable.

L’enquêtrice fait diffuser les photos d’El Haddad Asufi entrant ou sortant de l’ascenseur. Les jours , les heures sont connues

Au total, dans ce studio, Ibrahim El Bakraoui et Ali El Haddad Asufi "s’y côtoient durant 35 heures" jusqu’en janvier 2016, rapporte l’enquêtrice. Quand on sait qu’Asufi a toujours nié son implication , ses allées et venues dans la cache du terroriste posent question…

Par exemple Me Mechin, l’un des avocats de l’accusé, interroge la policière belge. Des traces de l’explosif TATP y ont-elles été retrouvées ? Non, admet l’enquêtrice. Sait-elle alors ce qu’Ali El Hadad Asufi faisait précisément avec Ibrahim El Bakraoui dans ce logement ? "Non, je ne sais pas. Je n’étais avec lui dans l’appartement", rit l’enquêtrice.

Avec ces allers-retours à Etterbeeek de son client, dans le studio où se cachait Ibrahim El Bakraoui, "quelles conclusions en tirez-vous ?": "Ce n’est pas à moi de juger ni de tirer des conclusions", répond elle. Me Méchin, lui, avance une hypothèse que n’ont pas retenue les enquêteurs : "On peut en conclure qu’il rendait visite à son ami, qu’il lui a apporté des vêtements, véhiculé et qu’il a rendu service à son ami…" "C’est votre hypothèse, conclut l’enquêtrice en écartant les mains.

Yassine Atar est aussi soupçonné d’avoir rendu visite à Ibrahim El Bakraoui à Verviers. Notamment le 19 septembre en compagnie d’Ali El Haddad Asufi qui reconnaît s’être rendu à Verviers ce jour-là.

La policière prouve par l’analyse des téléphones de ces deux accusés. "ils bornent au même moment, aux mêmes endroits". Et l’enquêtrice, se basant sur d’autres relevés, de supposer que ce soir-là se sont retrouvés Mohamed Bakkali, Ibrahim El Bakraoui, Ali El Haddad Asufi et Yassine Atar.

L’hypothèse de cette rencontre "a été rendue possible grâce à un important travail sur la téléphonie", appuie l’un des avocats généraux, Nicolas Braconnay.

Pas pour Me Kempf qui trouve que la policière va un peu vite en besogne et surtout en hypothèses. Les enquêteurs ont-ils vérifié le contenu de ces SMS ?

"Ce serait intéressant pour la manifestation de la vérité…", poursuit l’avocat. Mais cette vérification-là n’a pas été faite. L’enquêtrice, elle, s’en tient aux faits démontrés : "Le 19 septembre, on a déterminé qu’il y a ce déplacement à Verviers. On l’a mis en évidence et M. Atar n’a pas de réponses pour ce déplacement", rappelle-t-elle.

L’avocat ne cache pas l’affaire : comment expliquer que les enquêteurs n’ont pas repéré un trajet de Yassine Atar à Verviers (pour son métier), le 25 septembre 2015, "alors que tout déplacement à Verviers est alors suspect"? L’enquêtrice n’a pas d’explication : "Cette autoroute, c’est 120 km entre Verviers et Bruxelles et il y a de nombreuses antennes téléphoniques", l’enquêtrice rit encore. "Vous rigolez ?”, finit par lui dire l’avocat, plus qu’étonné. Décidément les enquêteurs belges étonnent , agacent et décontenancent encore la salle d’audience.

https://youtu.be/DEop8wjFgPI

Michel Zerbib

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