Il s’agit d’un véritable problème de santé publique par sa fréquence élevée et son évolution volontiers chronique. On dit qu’il toucherait de façon hebdomadaire, entre 15 et 20% de la population française et quotidiennement entre 4 et 7% de nos concitoyens, des plus de 50 ans dans près de la moitié des cas.
Le reflux gastro-oesophagien est la remontée d’une partie du contenu de l’estomac dans l’œsophage, le long conduit qui part de la bouche et descend vers lui. L’estomac vit dans l’acidité (le liquide gastrique c’est quasiment de l’HCL), l’œsophage lui, n’en supporte pas la moindre trace et peut s’enflammer entraînant ce qu’on appelle une œsophagite. On distingue : - Le reflux gastro-œsophagien « physiologique », intermittent, qui n’entraîne pas de complications. Les symptômes, rares, brefs et non douloureux, surviennent surtout après les repas, la nuit ou dans certaines positions, en particulier, penché en avant ; - Le reflux gastro-œsophagien « pathologique », plus important, plus fréquent et prolongé dans le temps.
Le reflux gastro-oesophagien se manifeste le plus souvent par des brûlures, partant du creux de l’estomac, remontant dans la poitrine, s’accompagnant d’un renvoi de liquide acide de l’estomac ou régurgitation, sans efforts de nausées ou de vomissements. On peut aussi observer d’autres signes digestifs (douleurs, hoquet, éructations). Mais les symptômes sont parfois discrets ou trompeurs : manifestations ps-ORL comme un enrouement, ps-pulmonaires avec toux chronique, gêne respiratoire ou crise asthmatiforme, ps-cardiaques (douleurs thoraciques).
Principalement par des médicaments, les IPP ou inhibiteurs de la pompe à protons, dont l’appellation rend compte du mécanisme d’action chimique, et des pansements gastriques anti-acide (gels d’alumine, Gaviscon°). Les IPP sont souvent prescrits en traitement d’épreuve, à demi dose, pendant quelques jours ou semaines, puis s’ils font preuve d’efficacité, en continu, par intermittences (1 à 2 fois par semaine) ou à la demande. A noter qu’ils doivent être administrés de préférence le matin à jeun. Beaucoup d’enquêtes estiment qu’ils sont trop largement utilisés, sans nécessité impérieuse dans la moitié voire les deux tiers des cas.
Beaucoup pensent qu’ils sont dénués d’effets indésirables, même en utilisation au long cours. Une étude écossaise, portant sur près de 200 000 patients traités et suivis de 1999 à 2013, évoque un surrisque de gastro-entérites infectieuses (Campylobacter, Clostridium difficile entre autres…).
Les mesures hygiéno-diététiques sont essentielles : - D’abord bien mastiquer car elle joue un rôle sous-estimé et pourtant primordial, réduisant les aliments en morceaux plus facilement digestibles et en libérant une salive alcalinisante, précieuse pour lutter contre l’hyperacidité gastrique ; - Renforcer la barrière anti-reflux en évitant les repas gras et copieux, les boissons gazeuses, le sel, l’alcool, le tabac++… ; - Lutter contre l’acidité en se souvenant que les graisses, les protéines, les sucres, le sel sont acidifiants, que les fruits et légumes, les épices, les eaux bicarbonatées sont eux alcalinisants ; - Améliorer ses défenses antioxydantes car l’hyperacidité gastrique libère des radicaux libres qui endommagent l’œsophage, entretiennent ou aggravent son inflammation. Les antioxydants sont concentrés, rappelons-le, dans les fruits (colorés et exotiques) et les légumes ; - Réensemencer l’intestin grâce à des probiotiques ; - Réduire l’inflammation en limitant les om-6 (très répandus dans les plats-traiteur et le street-food) et en privilégiant les oméga-3 qu’on trouve principalement dans l’huile de colza et les poissons gras ; - Eviter ou modérer l’alcool, le café, le Coca et les sodas, le chocolat qui favorisent le relâchement du cardia protecteur.
J’aime beaucoup cette saynète entre un Docteur et son patient que rapporte Courteline : - Plus de tabac, je ne fume pas, - Plus d’alcool, je n’en bois jamais, - Plus de vin, je ne bois que de l’eau, - Aimez-vous les frites, j’adore Dr, - Alors n’en mangez plus. Les règles hygiéno-diététiques sont certes importantes mais elles doivent d’abord être justifiées, pas draconiennes pour être suivies longtemps et sans s’empêcher un petit écart-plaisir de temps à autre, il y a tout de même 14 repas/semaine.
Docteur Serge Rafal
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