C'est toujours le brouillard autour des efforts de médiation du Premier ministre israélien entre les présidents russe et ukrainien. Au début de la semaine, Naftali Bennett avait reconnu que les choses évoluaient très lentement et que les divergences restaient profondes. Si la Russie n'exige plus le départ du président Zelensky, ni le désarmement de l'Ukraine, l'Ukraine de son côté ne revendique plus son adhésion à l'Otan, mais rien d'autre n'a encore bougé. Comme l'a résumé Naftali Bennett, la route est encore longue. Ces quelques progrès ne sont pas à mettre au seul crédit d'Israël, mais il est certain que la médiation du chef du gouvernement israélien a pesé dans la balance. Depuis l'entretien du 5 mars à Moscou entre Vladimir Poutine et Naftali Bennett, on ne compte plus les entretiens téléphoniques qu'a eus le Premier ministre avec le chef du Kremlin et le président ukrainien.
Cette navette téléphonique entre les deux belligérants ne donne lieu à aucun commentaire public du côté de Moscou, qui se contente de communiquer sur la tenue de ces conversations. A Kiev en revanche, on est plus disert, mais pas forcément plus clair. On a vu le discours dimanche de Volodymyr Zelensky aux députés de la Knesset, où il se plaignait de la frilosité israélienne à l'égard de la Russie et réclamait une aide plus conséquente de la part d'Israël, en particulier militaire. Même s'il était revenu sur ses propos un peu plus tard, pour insister sur sa reconnaissance envers Naftali Bennett pour ses efforts diplomatiques, on a bien compris que la position ukrainienne à l'égard d'Israël reste ambivalente. Hier, c'est son chef de cabinet qui a accordé plusieurs entretiens à des médias israéliens, pour réitérer la demande principale de Kiev à Israël : la fourniture de batteries de défense aérienne Dôme de Fer. Mais le conseiller du président Zelensky a aussi assuré que l'Ukraine tenait à la poursuite de la médiation d'Israël, seul pays selon lui, en mesure d'accueillir une rencontre au sommet entre Zelensky et Poutine, qui devrait, ajoute-t-il, se tenir à Jérusalem. Il a même réaffirmé qu'Israël devrait être un des pays garants en cas de conclusion d'un accord entre les deux belligérants, et qui devrait impérativement comporter un arrêt total des combats, le retrait des forces russes et un dispositif garantissant la sécurité de l'Ukraine.
Naftali Bennett quant à lui, a déjà expliqué que son action devait trouver le point d'équilibre entre l'empathie envers les citoyens ukrainiens et les intérêts sécuritaires d'Israël. On sait qu'Israël a toujours besoin de sa coordination tactique avec l'armée russe présente en Syrie pour ses frappes contre les objectifs iraniens en territoire syrien. Et que ce point rend sa marge de manœuvre étroite et délicate. Hier, l'ambassadeur de Russie à Damas qualifiait d'ailleurs de "provocations" les frappes de Tsahal en Syrie, affirmant qu'elles visaient à déclencher une escalade qui permettrait aux Occidentaux d'attaquer à leur tour les troupes russes en Syrie. Ce n'est qu'une déclaration isolée, mais qui indique que la nervosité de la Russie pourrait se propager à d'autres fronts. Et Israël, qui a besoin de cet accès à la Syrie, ne veut pas non plus servir de prétexte à la Russie pour attiser son antagonisme avec les puissances occidentales. La médiation de Naftali Bennett pourrait donc devenir de plus en plus compliquée.
Pascale Zonszain
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