5 derniers jours avant les massacres de Paris, la chronique judiciaire de Michel Zerbib

France.

5 derniers jours avant les massacres de Paris, la chronique judiciaire de Michel Zerbib
(Crédit : Twitter)

Au bout de 6 mois de procès, nous sommes arrivés à la veille des attentats. L'officier de police explique que les derniers préparatifs ont commencé le 8 novembre 2015. Ce jour-là, Salah Abdeslam a effectué deux dépôts en espèces de 1 500 euros à Molenbeek. "Cet argent servira à la location des véhicules", a d’abord expliqué l'enquêtrice. Le lendemain, Salah Abdeslam rechargera sa carte de crédit qui servira au paiement des planques près de Paris. Sur des images de vidéosurveillance, on voit Salah Abdeslam rentrer dans une agence de location pendant que Mohamed Abrini reste à l'extérieur. Salah Abdeslam loue une Clio et paye au moyen de sa carte bancaire.

Dans la foulée, Salah Abdeslam loue un deuxième véhicule, un Polo, dans une autre agence, toujours avec sa carte bancaire. Comme pour la première location, il présente son permis et sa carte d'identité belge.

Cette même journée, Brahim Abdeslam va dans une autre agence de location en compagnie de Mohamed Amri. Il  loue une Seat Leon et paie en cash. Il présente aussi son permis et sa carte d'identité belge. "Contrairement aux autres véhicules, il est équipé d'un système de géolocalisation", révèle l'enquêtrice.

Brahim Abdeslam et Mohamed Amri s'arrêtent ensuite pour faire de l'essence. L'enquêtrice cite une citation de Mohamed Amri dans laquelle il dit ne pas savoir pourquoi Brahim Abdeslam a loué la Seat Leon.

Brahim Abdeslam contacte le propriétaire d'une maison de Bobigny. L'enquêtrice explique qu'une réservation est effectuée pour trois personnes à l'hôtel Première classe du Blanc-Mesnil par Salah Abdeslam. La réservation est annulée le lendemain.

Le même jour, Brahim Abdeslam et Mohamed Abrini quittent alors Molenbeek pour la France, selon les données téléphoniques. La Clio est flashée sur l'autoroute A2 en direction de Paris.

Vers 23h, le véhicule arrive à Bobigny. Le propriétaire du pavillon rencontre les deux hommes. Brahim Abdeslam lui remet l'argent en cash, selon l'officier de police qui cite aussi une citation de Mohamed Abrini

Dans la nuit du 10 au 11 novembre, deux personnes se présentent pour louer quatre chambres à l'Appart City du Blanc-Mesnil. Il s'agit de Brahim Abdeslam et de Mohamed Abrini, selon les images de vidéosurveillance. La location est finalement refusée, faute de garantie.

Les deux hommes retournent ensuite vers la Belgique, selon les données téléphoniques. "D'après les données téléphoniques, immédiatement être revenu Mohamed Abrini rejoint Salah Abdeslam", poursuit l'enquêtrice.

Selon la policière belge , six numéros sont destinés aux "coordinateurs" des attentats et huit sont pour les "auteurs" des attaques.

"Tous les numéros coordinateurs sont successivement activés le 11 novembre 2015. Ils se trouvent dans le même secteur de la gare du Midi, à Bruxelles."

Le véhicule Clio est repéré le soir du 11 novembre en direction de Paris. Salah Abdeslam et Mohamed Abrini sont filmés sur une station-service. A 20h55, Salah Abdeslam effectue le paiement des deux chambres à l'Appart-City d'Alforville. Sur le chemin du retour, la Clio est flashée. Donc pas de précaution .

L'enquêtrice cite une audition de Mohamed Abrini dans laquelle  il explique avoir demandé à Salah Abdeslam pourquoi il louait ces chambres. "Il m'a dit que des gens allaient se faire exploser et que ça allait partir en cacahouète."

Dans la nuit, Salah Abdeslam, Brahim Abdeslam et Mohamed Abrini apparaissent sur des images de vidéosurveillances. Toujours durant cette même nuit, le véhicule Seat active sa balise GPS près de la rue Henri Bergé où se trouve l'une des planques de la cellule terroriste. Les voitures prennent ensuite la route vers Charleroi, où se situe l'autre cache. 

L'enquêtrice cite encore Mohamed Abrini sur cette soirée. "Je savais ce qui allait se passer, je savais que c'était la dernière fois que je les voyais. J'y suis allé pour passer ces derniers instants avec eux. Je savais qu'ils allaient partir vers la mort."

À bord de la Clio : Salah Abdeslam, Brahim Abdeslam et Mohamed Abrini. 

Dans la Polo, les auteurs de l'attaque du Bataclan : Foued Mohamed-Aggad, Samy Amimour et Omar Mostefaï. Ainsi que Bilal Hadfi qui s'est fait sauter au Stade de France.

Dans la Seat, on retrouve Abdelhamid Abaaoud, Chakib Akrouh, du convoi des terrasses ainsi que les deux Irakiens du Stade de France.

Oui Christophe L'enquêtrice va citer encore  Mohamed Abrini sur ce "convoi de la mort", comme il l'appelle lui-même. "C'était la dernière fois que je les voyais, c'était les accompagner dans leur dernier souffle, leur dernier instant." Il dira comprendre que l'attentat est imminent mais ne pas connaître la date, ni les objectifs.

L’avocat général Nicolas Braconnay note l'absence totale de précaution pour la location des voitures et des appartements qui contraste avec le dispositif poussé de l'activation des puces. "On a l'impression qu'il y a des gens qu'on crame d'un côté et que de l'autre côté, on préserve les organisateurs que sont les El Bakraoui", dit l'avocat général. "Oui, c'est ça", répond l'enquêtrice.

On va résumer Maître Vettes, un des avocats de Salah Abdeslam, fait remarquer que c'est la première fois qu'on entend parler de Brahim Abdeslam dans la préparation des attentats. "Il est omniprésent", "Ce qui m'interroge, c'est qu'il y a un véritable contraste avec la première phase de préparation des attentats où il était inexistant", dit l'avocat.

Maître Ronen poursuit ses questions. Elle s'intéresse notamment à la location de la Polo par Salah Abdeslam et demande où elle était pendant trois jours. "Elle n'a pas de système de géolocalisation, mais un PV a été établi en date du 10 novembre, je n'ai pas plus de renseignement", répond l'enquêtrice.

"Est-ce que ça ne vous étonne pas que pour un tel véhicule, on ne prenne pas la précaution de payer le stationnement", demande maître Ronen. "Ils ne prennent pas de précautions, ils font des excès de vitesse", poursuit l'enquêtrice. Elle explique que la fourrière n'est pas systématique en Belgique pour mauvais stationnement.

L'enquêtrice conclut qu'il n'y a pas d'éléments qui permettent de prouver que c'est Salah Abdeslam qui a transmis les clés de la voiture.

Les avocats de Amri , de El haddad et de Atar vont eux aussi faire d’ingénieux raisonnements et d’audacieuses hypothèses en passant au crible les éléments donnés par l’enquêtrice belge qui rit souvent. Sans doute la nervosité d’un procès long mais toujours passionnant.

A noter que des problèmes de connexion ont largement perturbé l'audience. La défense a fait remarquer que cela ne serait pas arrivé si les enquêteurs belges étaient venus en présentiel.

Michel Zerbib

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