Une victoire très nette mais beaucoup d’interrogations sur des sujets qui curieusement n’ont pas animé l’entre deux tours ni même le fameux débat des finalistes : sécurité et justice. Le 11 avril, nous devisions déjà sur les programmes des deux candidats et leurs démêlés de près ou de loin avec la justice et nous constations que cela n’avait que très peu d’impact sur le candidat-président en dépit d’une liste impressionnante de démissions de ministres et de collaborateurs du chef de l’Etat. On le disait, les deux finalistes de l'élection présidentielle proposaient en matière de sécurité, un renforcement des effectifs de police et de gendarmerie. Si Emmanuel Macron insiste sur la sécurité "du quotidien", Marine Le Pen mise de son côté sur une répression plus ferme de la délinquance. Opposition classique et idéologique mais qui s’est estompée au fur et à mesure de la campagne
On a commenté sur Radio J l’étonnante faiblesse de Marine Le Pen sur ces sujets de prédilection lors du débat. Après le premier tour c'est plutôt Emmanuel Macron qui a su le premier embrayer sur la question sécuritaire lors du déplacement en Alsace. Le président-candidat a grillé la politesse à son adversaire en parlant de ruralité : « la sécurité du quotidien » et notamment le « doublement de la présence des forces de l'ordre sur la voie publique » C’est une mesure présentée lors du Beauvau de la sécurité . Dans le cadre d'une loi de programmation qui a été présentée mi-mars en conseil des ministres, prévoyant quinze milliards d'euros de budget supplémentaires. La création de 200 nouvelles brigades de gendarmerie figure aussi à son programme. Toujours dans cet esprit , le candidat Macron a mis en avant les actions menées lors de son quinquennat sur les cambriolages, les vols de véhicules, la haine sur internet, les « cold cases », le harcèlement de rue ou le terrorisme. Emmanuel Macron prône l'extension des amendes forfaitaires, déjà en place pour l'a consommation de stupéfiants et l'occupation de halls d'immeuble, à tous les « délits qui empoisonnent le quotidien ».
Emmanuel Macron a souhaité la constitution d'une « force d’action républicaine » ! Ce sont des policiers, gendarmes, magistrats, et d'équipes éducatives ensembles pour « rétablir en urgence l’ordre ». Et puis encore une proposition que n’a pas désavoué Marine Le Pen « la possibilité d’un encadrement par des militaires » pour les mineurs délinquants.
Avec le recrutement de 1 500 cyberpatrouilleurs et la création d'un « filtre anti-arnaques » qui « avertira en temps réel tous les usagers d’Internet avant qu’ils ne se rendent sur un site potentiellement piégé ». Il faudra rapidement le mettre en place.
Côté justice, rapidement car on en parlait la semaine dernière : il annonce le recrutement de « 8 500 magistrats et personnels de justice supplémentaires d’ici 2027 », en rappelant que le budget de la place Vendôme a « augmenté comme jamais depuis 20 ans » sous son quinquennat. Tout cela parviendra t-il à contenter une partie de l’électorat de Marine Le Pen dans la perspective d’une large ouverture ? Rien n’est moins sûr !
Les deux finalistes du deuxième tour étaient d’accord pour proposer des sanctions alourdies pour les auteurs d'infractions visant les forces de l'ordre : privation des droits civiques pour Emmanuel Macron, et création de « peines minimales » pour Marine Le Pen.
D’accord également tous les deux pour lutter contre l'islamisme. D’accord pour construire plus de places de prison : Emmanuel Macron promet de poursuivre le programme de construction de 15 000 places supplémentaires. Dans le programme d'Emmanuel Macron dans le projet présidentiel on peut lire : poursuite de la fermeture des associations et des mosquées radicales, des écoles clandestines, de l’expulsion de prêcheurs radicalisés, etc ; Impossible pour Le Pen de critiquer.
Il a suffi d’une phrase, prononcée par Emmanuel Macron le 12 avril, pour placer la question du port du voile au cœur des débats lors de cet entre-deux-tours. En déplacement à Strasbourg, le président sortant a félicité une femme voilée qui s’est dite «féministe». Une réponse à Marine Le Pen qui proposait de son côté d’interdire le port du voile dans l’espace public, un «uniforme islamiste» imposé selon elle aux jeunes femmes. La candidate du Rassemblement national a par la suite changé de ton sur ce sujet. «Je ne suis pas obtuse», a-t-elle tempéré après avoir été interpellée par une femme voilée sur le marché de Pertuis. Trop tard pour essayer de capter une petite part du vote très convoité des musulmans pratiquants de France . La stratégie du président sur tous ces points a été payante et a asséché la veine sécuritaire de son adversaire.
Michel Zerbib
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