Ce terme traduit mieux que l’ancienne appellation « troubles maniaco-dépressifs » la réalité des symptômes, c'est à dire une alternance variable dans leur durée et leur intensité de phases d’excitation que les patientes, plus touchées que les hommes, apprécient particulièrement et de périodes de dépression qu’elles redoutent terriblement. La prévalence du trouble bipolaire est élevée, entre 1% et 2,5% de la population, selon qu’il associe à la dépression une manie ou une hypomanie, forme atténuée qui peut facilement et plus longtemps passer inaperçue. La bipolarité a de grosses répercussions sur la qualité de vie et la santé globale avec une évolution péjorative, une mauvaise adaptation sociale, un risque accru de maladies cardio-vasculaires, de syndromes métaboliques et de suicides : ceux-ci sont 15 à 30% plus fréquents que dans la population générale ; entre le quart et la moitié des patients fait au moins une tentative.
A 60% environ. Lorsque le père ou la mère est atteint, un enfant sur 10 risque de développer la maladie. Lorsque les 2 sont atteints, c’est 1 sur 2. Mais interviennent également des facteurs psychologiques (traumatismes dans l’enfance, conflits familiaux, stress chronique) et environnementaux (consommation de toxiques, climat propice à un mauvais sommeil, problèmes au travail).
La maladie se révèle volontiers par un épisode dépressif vers l’âge de 20 ans, le trouble bipolaire proprement-dit est plus tardif, il survient plutôt entre 15 et 35 ans. Il se manifeste par des sautes d’humeur généralement discrètes, parfois plus ostentatoires, oscillant entre hyperactivité, agressivité, absence d’inhibition ce qu’on appelle la phase « up », et tristesse, abattement, accablement, démotivation totale de la phase dite « down », excusez cet anglicisme explicite.
La patiente est anormalement euphorique, infatigable, imprudente, parfois agressive nous l’avons dit. Elle est exaltée, sans aucune inhibition, dit et fait tout et n’importe quoi, sans se soucier des conséquences de ses propos et de ses actes. Les malades apprécient tout particulièrement cette phase où rien ni personne ne leur résiste, pas plus l’éducation que les convenances sociales. Et bien souvent, ils refusent les soins dont ils sont persuadés ne pas avoir besoin. La décision de les traiter ou de les faire hospitaliser peut nécessiter de longues tractations et parfois la contrainte.
Une valse à 3 temps : une phase maniaque, une phase dépressive, une phase normale. La durée d’un cycle tout comme sa fréquence est variable, allant de quelques heures à plusieurs mois, voire une année ou plus. Les malades non traités vivent généralement huit à dix cycles maniaco-dépressifs au cours de leur vie, d’autres plus malchanceux, plusieurs au cours de la même année. Un traitement bien conduit et bien suivi tend à les espacer. En l’absence de prise en charge, les cycles se poursuivent et leur fréquence s’accélère. Les symptômes peuvent s’aggraver ou se compliquer de troubles psychotiques avec hallucinations et délire, de comportements sociaux déviants, les risques d’alcoolisme et de toxicomanie sont importants.
- Les médicaments bien sûr dont des thymorégulateurs ; - Un soutien psychoTt pour le patient… et parfois la famille ; - L’éducation thérapeutique pour acquérir et maintenir les compétences nécessaires à une gestion correcte de sa vie ; - Les conseils d’hygiène de vie que vous connaissez ; - Et parfois les archaïques électrochocs, redoutés mais efficaces pour les cas-rebelles aux traitements pharmacologiques.
« Dis-moi un peu d’où vient cette manie de n’être jamais ce qu’on est » écrit Alfred de Musset. Auquel répond Dino Buzzati, l’auteur du « Désert des Tartares » : « Cette abominable manie de ne pas dire tout de suite qui l’on est ». La bipolarité est une maladie singulière et douloureuse pour le malade… et ses proches. Il est toutefois possible d’en souffrir et de vivre quasi normalement, à condition de respecter l’observance, malheureusement pas toujours la règle ICI.
Docteur Serge Rafal
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