Fluctuat nec mergitur : battu par les flots mais ne sombre pas, la chronique de Michel Zerbib

France.

Fluctuat nec mergitur : battu par les flots mais ne sombre pas, la chronique de Michel Zerbib
Notre chroniqueur judiciaire Michel Zerbib (Crédit : Twitter)

Me Mathieu Riberolles a été le premier à plaider évoquant la mémoire d'Anne-Laure, jeune femme brune de 36 ans dont la photo s'affiche sur le grand écran. Cette employée des Douanes était "douce et discrète comme sa mère, mais pouvait se montrer intransigeante comme son père", décrit l'avocat. Mais "Anne-Laure ne viendra pas témoigner à votre procès, elle ne dira plus rien à personne car elle a été assassinée à la terrasse de la Belle équipe d'une balle dans la tête". "Pour sa famille et les gens qui l'aimaient, Anne-Laure était une étoile, un repère. Anne-Laure était un roc et les rocs ne meurent jamais".

Me Thibault de Montbrial défend une vingtaine de parties civiles à ce procès. Il a évoqué quelques victimes : Guillaume, journaliste aux Inrocks, fauché au Bataclan ; Jacqueline profondément choquée par l'explosion d'un kamikaze et qui est morte depuis d'un cancer ou encore Victor, passionné de foot, mais qui, touché aux jambes, ne suivra plus ce sport que dans un fauteuil.

Me Thibault de Montbrial a salué la tenue de ce procès, "cette réussite institutionnelle". Il a dit sa "fierté d'en avoir fait partie", et salué la dignité des victimes, le travail du parquet antiterroriste, de la police et même des avocats de la Défense parce que tout ça illustre pour lui "la façon dont ce pays a tenu".

Me Romain Fournier a évoqué la mémoire d'Elodie, décédée d'une balle dans le visage au Bataclan. "Comme le baiser du Diable", a lancé l'avocat .
Il rappelle que cette étudiante en design de 23 ans voulait créer des meubles pour aider les personnes handicapées. Elodie était "pétillante altruiste, désordonnée, fantaisiste, imaginative, un petit soleil pour sa mère".

Elle a évoqué la mort de David, professeur des écoles, décédé au Bataclan et qui était venu au concert pour y voir son ami Cyril. L'avocate représente la compagne et les deux enfants de David. "Claire, si vous avez allumé la Web radio, laissez-moi vous tenir la main le temps de parler de David".

Me Pierre Thevenet a raconté l'histoire de Suzon et Paul, une sœur et un frère qui étaient ensemble au Bataclan. Suzon a reçu une balle dans la tête et Paul a réussi miraculeusement à s'en sortir. Mais "pourquoi lui et pas sa sœur", se demande encore aujourd'hui ce jeune homme qui peine à surmonter le traumatisme.

Me Florence Pelé représente Gaëlle, la sœur de Chloé qui a été grièvement blessée (3 balles) sur l'une des terrasses. "Je n'aime pas trop le terme employé de victime par ricochet", souligne Me Pelé pour évoquer les familles de victimes (ou victimes indirectes). Mais l'avocate reconnaît que la balle de kalachnikov qui "a ricoché sur les dents de Chloé a transpercé, d'une certaine manière, le cœur de sa sœur et de ses parents. Gaëlle prend sur elle tant qu'elle peut la souffrance de sa sœur, elle prend des anti-dépresseurs.

Je lis sa conclusion : "Votre verdict marquera la fin de cette traversée dans la nuit du 13 novembre. Cette fin du procès angoisse beaucoup de parties civiles pour qui l’arrêt du procès marquera un grand vide. Alors vous devez, Monsieur le Président, Mesdames et Monsieur de la Cour, montrer que votre verdict n’est pas la fin mais un début, une promesse, la promesse de l’aube suivant cette nuit terrible. Notre confrère Henri Leclerc, sans doute le plus jeune d’entre nous, a conclu ses mémoires par cette phrase 'Je crois au matin'. Si nous portons la robe, peu importe la couleur et que nous faisons le métier de défendre ou celui de juger c’est que nous croyons au matin et que la nuit, cette nuit du 13 novembre n’est pas définitive."

https://youtu.be/KWoU1jBSHUs

Michel Zerbib

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