Provisoirement ou définitivement, l‘avenir le dira, les aléas de la vie politique privent la France d’un homme d’État, Manuel Valls, qui avait affronté, comme ministre de l’Intérieur puis comme Premier Ministre, la plus meurtrière des agression, perpétrée par le terrorisme islamiste à partir de janvier 2015.
Manuel Valls semble bien frappé par cette malédiction des grandes figures de la gauche républicaine, celles qui associent la fidélité aux objectifs d’émancipation sociale au le réalisme économique et à la défense de l’ordre républicain. Comme Pierre Mendès-France, Manuel Valls a dirigé le gouvernement en dépit de l’hostilité de l’aile gauche du parti socialiste, comme Pierre Mendès-France, il s’est présenté devant les électeurs en refusant de s’abaisser aux promesses démagogiques, et il a été éliminé.
J’entends depuis dimanche les ricanements haineux de l’extrême droite et de l’extrême-gauche. Comme pour Pierre Mendès-France… dont la défaite, en 1958, à Louviers dont il était député depuis 1932, réjouissait les staliniens, les nostalgiques de Vichy et une cohorte de médiocres politiciens.
L’histoire a retenu le courage et la lucidité de Pierre Mendès-France, elle a oublié la plupart de ses adversaires.
L’histoire retiendra la fermeté de Manuel Valls face au terrorisme, sa défense de la liberté de la presse contre les assassins de Charlie, sa condamnation sans appel de l’antisémitisme et de l’antisionisme, qui armait les assassins des enfants de Toulouse et du magasin casher de la Porte de Vincennes, tout en faisant rire le gentil public de Monsieur Dieudonné. Elle oubliera le nom des médiocres opportunistes, qui divisèrent la gauche, préférant le clientélisme électoral à la lutte contre le terrorisme islamisme.
Je n’oublie pas, l’antisémitisme déchaîné contre Manuel Valls, accusé d’être l’agent du lobby juif, parce qu’il défendait l’État d’Israël et faisait appliquer les lois de la République en interdisant les meetings antisémites déguisés en spectacles.
Non la honte n’est pas du côté de Manuel Valls. Elle est dans cette autre gauche, ralliée à Mélenchon pour grapiller quelques sièges. Dimanche, deux candidates investies par la NUPES, Danièle Obono et Danielle Simonet, paradaient à Paris avec l’ancien leader du parti travailliste, Jeremy Corbyn, que les députés du Labour refusent de réintégrer à leur groupe parlementaire, dont il a été exclu pour sa complaisance envers l’antisémitisme.
Corbyn a tenté de ramener le Labour Party à l’époque de Bevin, dont il a fait l’éloge devant une délégation du Hamas. Bevin, ce ministre travailliste qui faisait tirer sur les rescapés de la Shoah quand ils tentaient de gagner la Palestine, Bevin, responsable de ces camps de la honte qui prolongeaient à Chypre le calvaire des juifs d’Europe, Bevin est un modèle pour Jérémy Corbyn. Pour prendre la tête du Labour, il a mené une campagne clairement antisémite, contre ED Miliband, ministre de Tony Blair, et son frère David, leader de la gauche du parti. Cette campagne a été suivie d’une chasse aux élus et responsables juifs du Labour, nombreux, car la gauche anglaise avait tourné la page de l’antisionisme avec celle du colonialisme britannique. Plus de mille plaintes pour antisémitisme ont été déposées devant les organes du Labour et toutes attestent de la complicité de Jérémy Corbyn.
Mélenchon, Danièle Obono et Danielle Simonet le savent. Mais la venue de Corbyn à Paris était l’occasion de s’adresser à un électorat sensible à ce que l’on nomme, par euphémisme, l’antisionisme.
Candidate dans le XXème arrondissement, Danielle Simonet entend déloger la députée socialiste Lamia El Aaraje. Entre Belleville et Ménilmontant, Danielle Simonet a entrepris de déjudaïser la gauche. Ces quartiers, peuplés jadis de travailleurs juifs qui votaient massivement à gauche, ont bien changé, mais ils ont continué à voter socialiste, et la députée élue Lamia El Aaraje, née au Maroc, apparait comme un modèle d’intégration républicaine. Danielle Simonet a besoin de couper Lamia El Aaraje des électeurs issus de l’immigration maghrébine. Antisioniste jusqu’à l’hystérie, Danielle Simonet adresse un message clair en s’affichant avec Corbyn. Si elle est élue députée, on peut compter sur elle pour porter, comme Corbyn à Westminster, la voix du Hezbollah, du Hamas, de la Syrie et de l’Iran et pour défendre, comme elle le fait à Paris, le boycott d’Israël. Elle peut bien sûr répéter que Corbyn n’est pas antisémite, puisqu’il ne combat jamais que l’État d’Israël. Comme elle, bien sûr…
Guy Konopnicki
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