Si le Premier ministre israélien cherche d'abord une solution qui permette le maintien de l'Agence Juive en Russie, il anticipe aussi l'éventualité d'une fermeture définitive, qui mettrait un terme à la mission d'organisation de l'immigration des Juifs de Russie vers Israël, mais aussi à son soutien éducatif et culturel aux communautés juives locales. Ce qui représenterait une des plus graves régressions des relations bilatérales depuis 1967.
Si l'URSS avait été parmi les premiers pays à reconnaitre l'Etat d'Israël en 1948, les relations s'étaient rapidement dégradées, jusqu'à la rupture totale au lendemain de la guerre des Six jours, quand l'Union Soviétique avait choisi le camp arabe contre Israël, qu'elle considérait déjà comme inféodée aux Etats-Unis. Il faudra attendre 1989 et l'issue du combat héroïque des refuzniks, pour que Mikhaïl Gorbatchev autorise de nouveau l'émigration juive vers Israël et 1991 pour qu'il rétablisse les relations diplomatiques avec Israël, quelques semaines avant la chute de l'URSS. Dans la décennie qui suivra, Boris Eltsine jouera la carte du processus de paix israélo-palestinien pour rétablir l'influence russe en Israël, appuyée justement par l'importante vague d'alyah de l'ancien bloc soviétique. Mais dans le même temps, la Russie ne renoncera ni à son implantation dans le monde arabe, ni à son soutien à l'Iran, à qui elle vend des armes et même des installations nucléaires. C'est Vladimir Poutine, au tournant des années 2000, qui va réellement normaliser les relations avec Israël, en étant le premier dirigeant russe à s'y rendre en visite d'Etat en 2005. Les échanges économiques prospèrent et les relations se pérennisent, même si, là encore, Poutine n'abandonne jamais son soutien aux pays arabes, ni à l'Iran et accueille à Moscou les dirigeants du Hamas et du Jihad islamique. Et surtout, à partir de 2015, il prend pied en Syrie, à la demande d'Assad et n'en a plus bougé depuis.
Au Proche-Orient, qu'il considère comme son pré carré, la tactique suivie par Poutine est de ne se fâcher avec personne et d'entretenir des relations avec tout le monde, d'abord dans les intérêts de la Russie et même si cela peut, ponctuellement, la desservir. Mais cela reste le meilleur moyen de garder une influence et de contrer celle d'autres puissances, à commencer par les Etats-Unis. Avant même la fin de l'empire soviétique, les responsables du Kremlin s'étaient rendu compte que la rupture des relations avec Israël avait été contreproductive, et Poutine ne refera pas la même erreur.
Toutefois, le président russe est conscient que sa guerre en Ukraine a changé la donne et qu'il doit de nouveau tester ses partenaires. En 2014, Israël était resté neutre quand il avait annexé la Crimée. En 2022, le gouvernement israélien a d'abord joué la prudence, avant que Yaïr Lapid, encore ministre des Affaires étrangères, condamne expressément Moscou. Avec cette annonce sur la fermeture de l'Agence Juive, le chef du Kremlin veut aussi voir jusqu'où le nouveau Premier ministre israélien est prêt à aller ou s'il va choisir, comme Netanyahou et Bennett, la ligne de moindre résistance pour garder une liberté d'opération en Syrie contre l'Iran, que Poutine a pourtant laissé s'enraciner à sa guise sur le territoire syrien.
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Pascale Zonszain
Poutine teste Israël
Israël.
Publié le 25/07/2022 à 09h36 - Par Gabriel Attal
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