Rapatriement des familles de djihadistes : la France condamnée par la Cour Européenne des Droits de l'Homme

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Rapatriement des familles de djihadistes : la France condamnée par la Cour Européenne des Droits de l'Homme
(Crédit : DR)
La Cour avait été saisie par deux couples de Français qui avaient demandé aux autorités françaises le rapatriement de leurs deux filles, compagnes de djihadistes, et de leurs trois petits-enfants. La Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) a rendu mercredi 14 septembre un arrêt très attendu sur le rapatriement de familles de djihadistes français. Elle condamne la France à réexaminer "dans les plus brefs délais" les demandes de rapatriement de deux Françaises détenues en Syrie dans des camps de prisonniers jihadistes. Aux yeux de la CEDH, la France n'a pas assez motivé ses refus auprès des deux jeunes femmes et de leurs familles, les privant de la possibilité de les contester "et de vérifier [qu'ils] ne reposaient sur aucun arbitraire". Il y a deux mois la France avait accepté de ramener 35 mineurs et 16 mères après de longs jours de tergiversations. La Cour avait été saisie par deux couples de Français qui avaient demandé en vain aux autorités françaises le rapatriement de leurs filles, deux jeunes femmes compagnes de djihadistes, et de leurs trois enfants. Pour leurs avocats, ce refus viole plusieurs articles de la Convention européenne des droits de l'Homme, texte que la CEDH est chargée de faire respecter, en exposant notamment leurs filles et petits-enfants à des «traitements inhumains et dégradants».

Deux femmes parties pour la Syrie en 2014

Les deux femmes avaient quitté la France en 2014 et 2015 pour rejoindre la Syrie où elles ont donné naissance à deux enfants pour l'une, à un pour l'autre. Elles sont retenues avec eux depuis début 2019 dans les camps d'Al-Hol et de Roj, dans le nord-est de la Syrie. « Si la CEDH ne condamne pas la France, «ça voudra dire (que Paris) a le droit de maintenir des enfants en zone de guerre (...) parce que leurs parents ont fait les mauvais choix», a déclaré à l’AFP Me Marie Dosé, l'une des avocates des familles. Elle appelle à ne pas faire «sauter le dernier rempart qu'est l'enfant et l'innocence de l'enfant».

L’intérêt supérieur de l'enfant

La décision de cette émanation du conseil européen  sera observée bien au-delà de la France car elle concerne également les centaines de ressortissants européens actuellement détenus en Syrie. Sept États membres du Conseil (Norvège, Danemark, Royaume-Uni, Pays-Bas, Belgique, Espagne et Suède) sont ainsi intervenus dans la procédure. Cet arrêt «dépasse le cadre franco-français» et «va marquer la jurisprudence de la Cour», selon la Défenseure des droits Autorité administrative indépendante, la Défenseure est intervenue dans la procédure devant la CEDH et avait déjà interpellé à plusieurs reprises depuis 2019 le gouvernement français sur ce sujet, estimant déjà qu'il ne prenait pas en compte l'intérêt supérieur de l'enfant.

Privilégier le cas par cas pour la France

«La question centrale» de ce dossier, c'est celle de la «juridiction», explique l'institution : la France exerce-t-elle de façon extraterritoriale sa juridiction sur ces mères et leurs enfants en Syrie?  Ailleurs en Europe, des pays comme l'Allemagne ou la Belgique ont eux  d'ores et déjà récupéré la plus grande partie de leurs djihadistes. De son côté, au grand dam des familles et des ONG, Paris a longtemps privilégié le «cas par cas», doctrine défendue devant la CEDH par son représentant.

Un rapatriement massif en juillet

Mais début juillet, la France a fait revenir 35 mineurs et 16 mères, premier rapatriement massif depuis la chute en 2019 du  du groupe État Islamique (EI). Ces  mères, toutes visées par un mandat de recherche ou d'arrêt français, ont été mises en examen et écrouées, les mineurs confiés à l'Aide sociale à l'enfance.

Il reste une centaine de femmes et 250 enfants en Syrie

Selon le coordinateur du renseignement français et de la lutte contre le terrorisme, Laurent Nunez, il restait après cette opération une centaine de femmes et près de 250 enfants français dans des camps en Syrie. «Chaque fois que nous le pourrons, nous procéderons à des opérations de rapatriement», a-t-il déclaré mi-juillet à l'AFP. Michel Zerbib

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