Douleurs chroniques et opiacés, attention danger, la chronique du docteur Serge Rafal

France.

Ce sujet s’est installé progressivement à la faveur d’une réduction progressive de notre arsenal de lutte contre la douleur avec moins d’antalgiques, moins de myorelaxants, nous avons beaucoup regretté la suppression du Myolastan° en 2013, moins d’anti-inflammatoires en raison de leurs risques non seulement digestifs parfaitement connus mais également cardiaques, à présent avérés. Et même notre plus que centenaire paracétamol, ne peut plus être utilisé qu’avec d’infinies précautions posologiques (risques hépatiques graves au-dessus de 3g/jour). C’est ainsi que se sont très progressivement immiscées dans nos traitements de la douleur, les opiacés et les opioïdes, substances à la fois addictogènes et dangereuses, autrefois réservées aux soins palliatifs donc pour des périodes très courtes et maintenant d’usage courant donc sur du temps long. Cette famille comprend des drogues dures comme l’héroïne et la morphine et des produits plus « doux », la codéine, l’extrait d’opium, le tramadol, trop largement utilisés. Il est intéressant et révélateur. 3 frères, les Sackler achètent en 1952 un petit laboratoire qui fabriquait des laxatifs et deviennent milliardaires (19ème plus grosse fortune des USA d’après Forbes) avec un produit, l’Oxycontin (opioïde fort, toujours prescrit actuellement), hautement addictif, qu’ils commercialisent en 1996. Ils nient le risque de dépendance, rendant responsables les consommateurs, louvoient, soudoient la FDA et imposent ce médicament des douleurs palliatives… en élargissant ses indications. Avec la banalisation de ces substances est évidemment survenue l’épidémie de dépendance. Entre 2000 et 2010, les opiacés ont fait plus de victimes que la guerre du Vietnam. Entre 2000 et 2014, le nombre des décès a augmenté de 200%, dépassant le total, « héroïne et cocaïne » ou l’ensemble « accidents de la route et Sida ». Actuellement 2 millions de personnes aux USA, sont dépendantes aux antalgiques et plus de 12 millions les utilisent de façon inappropriée et excessive. Les anti-douleur sont parmi les 5 médicaments les + vendus, un 4ème est un Ains (Ibuprofène). Et parmi ces antalgiques, un contient de la codéine (3ème le plus vendu), l’autre du tramadol (4ème le plus vendu). La codéine était d’ailleurs vendue sans ordonnance jusqu’en 2017 et le décès de 2 ados d’overdose. Ce risque existe bien entendu avec tous ces produits, responsables de 5 décès par semaine. Beaucoup trop de patients prennent ces substances inutilement et dangereusement. Le tramadol est dans l’esprit du public un anti-douleur qui à tort inquiète peu. Il a une efficacité discutable sur la douleur chronique qu’il aggrave probablement à long terme. Ces produits sont des médicaments dangereux, aux nombreux effets 2aires (troubles cognitifs, hallucinations, confusion mentale, troubles digestifs, déficit en testostérone, dépression de l’immunité, interférences sur la respiration, augmentation du risque CV…). Et il n’existe aucune preuve incontestable de leur supériorité sur la douleur chronique (supérieure à 3 mois) et en particulier sur la qualité de vie avec ses composantes physiques et psychiques. La prévention des risques liés aux antalgiques opioïdes est une préoccupation majeure des pouvoirs publics. Limiter au maximum leur utilisation afin d’éviter le mésusage et l’augmentation des doses qui définit l’addiction. Mais c’est probablement un vœu pieu car les 12 millions de personnes qui souffrent de douleurs chroniques ne peuvent se contenter du paracétamol.  « La douleur est aussi nécessaire que la mort » nous dit Voltaire. Tâchons de diminuer ou soulager sans risques la 1ère à défaut de pouvoir supprimer la seconde. https://youtu.be/hiU6sLEvqY0 Docteur Serge Rafal

Newsletter

Restez informé ! Recevez des alertes pour être au courant de toutes les dernières actualités.
Réagir à cet article

L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.

Inscrivez vous à la newsletter
La météo locale
Douleurs chroniques et opiacés, attention danger, la chronique du docteur Serge Rafal