La révolution judiciaire israélienne est en marche

Israël.

Yariv Levin n'a pas perdu de temps. Il faut dire que le nouveau ministre israélien de la Justice planchait depuis longtemps sur son projet de réforme du système judiciaire et attendait son heure pour le mettre en branle. Ce député Likoud, très proche de Benyamin Netanyahou avait d'abord rempli la première mission que lui avait confiée le chef de son parti : négocier l'accord de coalition et pour cela, il a même pris durant quelques jours la présidence de la Knesset, le temps de faire voter les textes de loi nécessaires pour répondre aux conditions fixées par les partis du bloc Likoud. Yariv Levin est donc désormais au poste qu'il briguait et s'est mis aussitôt au travail. Le projet que le ministre de la Justice a présenté mercredi vise d'abord à réduire les pouvoirs de la Cour Suprême. Pour Yariv Levin, les juges de la Haute Cour de Justice israélienne ont pris au fil des années une influence excessive sur les décisions du pouvoir politique, en retoquant des lois votées par le Parlement et en statuant sur le caractère raisonnable d'une loi ou d'un décret pour le valider ou l'invalider. "Cela ne correspond pas à la démocratie" a plaidé le ministre Likoud, qui estime que si le peuple a donné une majorité politique à la Knesset, celle-ci doit être en mesure de légiférer conformément aux vœux de l'électorat. Et il affirme qu'à terme, sa réforme rétablira l'équilibre entre les trois pouvoirs, législatif, exécutif et judiciaire. Pour cela, il prévoit que la Cour Suprême devra statuer à une majorité qualifiée pour invalider une loi votée par le Parlement. Et surtout, elle ne pourra plus rendre d'arrêt sur des lois fondamentales, mais seulement sur des lois ordinaires, même si en réalité, elle ne l'a jamais fait. Dans le même temps, le Parlement disposera d'un outil qui lui permettra de passer outre un arrêt de la Cour Suprême sur l'inconstitutionnalité d'une loi, en utilisant une disposition de dérogation, c’est-à-dire le vote d'une majorité de 61 députés – la majorité absolue - contre la décision des juges. En revanche, la Knesset ne pourra plus rien faire si les 15 juges de la Cour ont rendu leur décision à l'unanimité. Le ministre de la Justice considère par ailleurs que la représentation des juges doit être plus en phase avec le paysage politique. Pour cela, il propose de changer le mode de désignation des juges. Aujourd'hui, le système en vigueur passe par une commission de neuf membres qui nomment les juges à la Cour Suprême. Cette commission est composée de 3 juges de la Cour Suprême, dont son président, de deux avocats membres du Barreau. La partie politique de la commission est formée de deux députés – un de la majorité et un de l'opposition – et de deux ministres, dont le ministre de la Justice qui préside la commission. Donc 5 juristes, face à 4 politiques. Yariv Levin veut inverser ce rapport de majorité au profit des politiques, considérant que les magistrats sont généralement plus à gauche et plus libéraux que l'actuelle représentation politique du pays. Le ministre de la Justice veut également modifier le statut des conseillers juridiques pour réduire leur pouvoir sur les membres du gouvernement. Ils ne seront plus désignés par le Conseiller du gouvernement, mais par les ministres eux-mêmes, ce qui réduira évidemment leur indépendance. Ce projet de réforme n'est pas vraiment une surprise. Mais c'est désormais un programme concret. Et il devrait alimenter dans les mois qui viennent un bras de fer avec la coalition, tant de la part du pouvoir judiciaire que des élus de l'opposition. Pascale Zonszain

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