J’ai déjà abordé à plusieurs reprises dans cette rubrique la maladie d'Alzheimer, à la fois le symbole des progrès de la médecine, puisqu’elle est liée en grande partie à l’allongement de l’espérance de vie, mais aussi l’incarnation de ses limites voire de sa défaite, provisoire espérons-le, par l’absence d’un traitement véritablement spécifique.
Les plus de 65 ans représentent autour de 20% de la population, soit 13 M de personnes. Elles devraient atteindre, d’après les prévisionnistes, autour de 30% en 2050, soit environ 22 millions d’individus. Et qui dit vieillissement sous-entend, nous l’avons dit, augmentation des maladies neurodégénératives et bien sûr de la forme la plus emblématique de déclin cognitif, la maladie d'Alzheimer. Elle terrorise le public, personnifiant la dépendance, la perte de contrôle et de dignité (parole, conscience, ses sphincters, sa fin de vie), la démence, sans oublier son coût élevé pour les familles et la crainte de l’Ehpad.
C’est plus d’1,2 million de personnes dont 20% de nonagénaires et 40% d’octogénaires mais probablement plus car le tiers ou la moitié des cas ne seraient pas diagnostiqués avec certitude. Et 225 000 nouveaux cas chaque année.
signes cliniques de la maladie ? Elle débute habituellement par une perte de la mémoire immédiate, des troubles du langage et du comportement, une perte des fonctions exécutives, une non-reconnaissance des objets ou des personnes donc des difficultés sociales, une désorientation. Mais des signes inhabituels doivent alerter : irritabilité, troubles de l’humeur (dépression, anxiété, sommeil), retrait social. L’évolution de tous ces symptômes est variable chez chaque individu et d’une personne à l’autre, ils n’apparaissent pas tous en même temps et avec la même intensité. A noter que la perte de ses clés, l’oubli du nom d’un acteur, d’une relation ou d’un médicament, le rappel d’un MDP ne sont pas nécessairement les prémisses d’une maladie d'Alzheimer.
Certains éléments ne peuvent pas être modifiés : - L’âge, la majorité des malades, nous l’avons vu, ont plus de 65 ans ; - Le sexe : les femmes sont touchées plus souvent que les hommes, peut-être simplement parce qu’elles vivent plus longtemps ; - Les antécédents familiaux : avoir un parent proche augmente le risque de développer la maladie mais l’importance de l’hérédité est encore à l’étude. D’autres éléments peuvent être contrôlés préventivement : - Les facteurs de risque cardio-vasculaires qui demandent à être contrôlés pour éviter ou retarder le déclin cognitif ; - Des facteurs sociaux- démographiques (mode de vie dont l’isolement++, l’état de santé, le niveau d’études) et environnementaux (lieu de vie, pollution) interagissent eux-aussi.
Comment porte t-on un diagnostic ? Par la confrontation entre les signes cliniques et l’imagerie, parfois la PL, ce qui est lourd. Nous attendons donc beaucoup des biomarqueurs sanguins.
On sait maintenant que la maladie est liée à la réplication d’agrégats de protéines tau et amyloïdes qui s’enchevêtrent dans différentes régions du cerveau, bien avant l’apparition des 1ers signes cliniques. Les scientifiques travaillent sur les possibilités de freiner leur doublement qui demande autour de 5 ans, afin de retarder l’apparition et l’évolution de la maladie.
L’arsenal s’enrichit progressivement grâce à de nouveaux médicaments (Ac monoclonaux utiles pour freiner la cascade amyloïde), aux moyens non-médicamenteux qui stimulent la réserve cognitive et aux thérapies relationnelles qui activent la résilience. Sans oublier bien sûr le rôle de l’alimentation (régimes méditerranéen et Mind) et de l’activité physique (1h/jour).
« C’est la mémoire qui fait toute la profondeur de l’homme » écrit Charles Péguy. On comprend ainsi le désarroi dans lequel plonge cette maladie qu’on commence fort heureusement à mieux appréhender donc peut-être à bientôt enfin traiter efficacement.
https://youtu.be/G3TGo5tYGds
Docteur Serge Rafal
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