L’ assassinat particulièrement barbare de l’octogénaire juive avait encore choqué le pays, un an après celui de Sarah Halimi.
Crime antisémite sans équivoque
Le meurtre de Mireille Knoll a été commis le 23 mars 2018 dans le 11e arrondissement de Paris. Mireille Knoll, âgée de 85 ans et rescapée de la Shoah, a été poignardée à son domicile de l'avenue Philippe-Auguste. Dans les jours qui ont suivi, deux suspects, Yacine Mihoub et Alex Carrimbacus, ont été mis en examen pour meurtre antisémite. Survenu presque un an après l'homicide de Sarah Halimi dans le même arrondissement, et le même jour que les attaques terroristes de Carcassonne et Trèbes, l'événement avait suscité un vif émoi.
Une Yddishe Mame qui fut d’abord une survivante de la Rafle du Vel’hiv
Mireille Kerbel naît le 28 décembre 1932 à Paris. Son père, Emilio Kerbel, est un tailleur venu d’Odessa, aujourd'hui en Ukraine et sa mère, Sarah Sinkel, est originaire de Varsovie en Pologne. Sara Sinkel a d'abord vécu au Brésil, où elle obtient la nationalité, avant d'arriver en France. Mireille Kerbel grandit dans le quartier du Marais rue de Turenne. En 1940, les parents décident d'envoyer Mireille et son frère à la campagne. Emilio Kerbel est arrêté et déporté au Camp de Gurs.
Sarah assiste à des arrestations par la police française.
Avec sa mère et son frère, Mireille Kerbel quitte la ville peu de temps avant la rafle du Vélodrome d'Hiver en juillet 1942 et prend un bus pour Montauban et passe la ligne de démarcation, la mère utilisant son passeport brésilien. Le père est peu après libéré. La famille va à Lisbonne au Portugal, où elle demeure un an, puis passe six mois dans un camp de réfugiés. Avec l'aide de l'American Jewish Joint Distribution Committee, elle va au Canada neuf mois avant la libération de Paris en 1944. Mireille Kerbel rentre en France après la Libération. A 16 ans, elle rencontre Kurt Knoll, un juif autrichien, rescapé d’Auschwitz. Ils travaillent dans le même atelier de couture. En 1949, elle épouse Kurt Knoll et retourne avec lui au Canada avant de revenir plus tard à Paris. Son mari tient alors un atelier de vêtements imperméables dans le Sentier, un des quartiers juifs de la capitale. Le couple a deux fils. Son époux meurt au début des années 2000. En 2018, Mireille Knoll, handicapée par la maladie de Parkinson, ne peut plus sortir de chez elle autrement qu'en fauteuil et accompagnée de son auxiliaire de vie.
Un crime particulièrement atroce et reconnu comme antisémite : 2 hommes rapidement arrêtés
Appelés sur place, les techniciens du Laboratoire central de la préfecture de police relèvent cinq départs de feu dans l'appartement. Le caractère antisémite du meurtre est retenu par la justice le 26 mars. Le voisin de Madame Knoll, Yacine Mihoub, 28 ans, est rapidement soupçonné, arrêté et mis en garde à vue. Il a été condamné pour avoir agressé sexuellement, en février 2017, la fille âgée de douze ans de l'aide-soignante de Mireille Knoll, et poursuivi pour des violences et des menaces de mort. Un deuxième suspect est arrêté près de l'opéra Bastille. Les deux hommes s'accusent alors mutuellement d'avoir porté les coups. Tous deux sortaient de prison. Le second suspect, Alex Carrimbacus, 21 ans, qui a rencontré son complice allégué en prison, a un long casier judiciaire. C’est lui qui affirme que « Yacine a reproché aux Juifs d'avoir des moyens financiers et une bonne situation avant de poignarder l'octogénaire sur son lit médicalisé en criant "Allahou akbar"».
La mère du tueur impliquée
Début avril, la mère de Yacine Mihoub est soupçonnée d'avoir nettoyé le couteau et fait disparaître les verres dans lesquels Mireille Knoll avait offert du porto à ses assassins. Elle est mise en examen pour « destruction ou modification des preuves d'un crime ». Les policiers explorent aussi la piste du crime crapuleux, ou d'une possible vengeance pour la condamnation de Yacine Mihoub à la suite de son agression de la fille de l'aide-soignante de Mireille Knoll. Après que les deux suspects ont fait appel devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris de leur renvoi devant les assises pour « meurtre sur personne vulnérable et commis en raison de la religion de la victime », la cour d'appel de Paris confirme le 19 novembre 2020 le caractère antisémite du meurtre de Mireille Knoll.
Un procès exemplaire que Radio J avait suivi
Durant ce procès, l’assassin n’aura de cesse de provoquer la Cour, de n’éprouver que très peu de compassion, jouant même avec les avocats des parties civiles comme Maitre Gilles-William Goldnadel. Très intelligent, Yacine Mihoub se révélera être un idéologue de la haine antisémite devant la famille si digne de Mireille Knoll. Il faut lire le témoignage émouvant des deux fils de la victime. Le 10 novembre 2021, Yacine Mihoub est condamné par la cour d'assises de Paris à la réclusion criminelle à perpétuité assortie d'une période de sûreté de 22 ans pour le meurtre à caractère antisémite de Mireille Knoll. Son co-accusé Alex Carrimbacus est acquitté pour le meurtre de cette vieille dame juive de 85 ans mais il est condamné à une peine de 15 ans de réclusion assortie d'une peine de sûreté de deux tiers pour le vol aussi à caractère antisémite de la victime. Yacine Mihoub et Alex Carrimbacus font appel mais ce dernier se désiste de cet appel en décembre 2021. Le 10 janvier 2023, l'avocat de Yacine Mihoub annonce que son client s'est désisté de son appel. Sa condamnation devient alors définitive. Aujourd’hui 5 ans après nous rendons hommage à la mémoire de cette femme, cette maman si heureuse de vivre qui aurait pu avoir 90 ans.
https://twitter.com/Amiel_David_/status/1638855677174071298?s=20
Michel Zerbib
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