Le gouvernement argentin a renoncé à la décoration, octroyée en 1979 par la junte militaire à l'ancien ministre français Maurice Papon. Cette annulation résulte de la condamnation de l'ancien membre du gouvernement vingt ans plus tard pour crimes contre l'Humanité, pour la déportation de Juifs pendant la guerre.
Le président Alberto Fernandez a annoncé un décret révoquant l'Ordre de Mai, grade de Grand croix, qui avait été décerné à M. Papon, alors ministre du Budget, par le chef de la junte Jorge Videla, à l'occasion d'une visite officielle en Argentine.
Une interdiction pour l'entourage ou les descendants de Maurice Papon suivra le décret, qui paraîtra aujourd'hui au Bulletin officiel, ainsi qu'une demande de restitution.
Le président argentin a expliqué que la mesure s'inscrit dans "notre engagement à garder vivante la demande de justice pour l'Holocauste envers les auteurs de ces atrocités, et pour être en paix avec notre conscience afin qu'aucun génocidaire ne puisse arborer sur sa poitrine une décoration argentine."
L'Ordre de Mai est une récompense pour les étrangers "qui par leurs efforts ont contribué au progrès, au bien-être, à la culture ainsi qu'à la bonne entente et à la solidarité internationales" et "méritent la gratitude de la Nation."
Entre 1997 et 1998, Maurice Papon a été jugé pour la déportation de 1.690 Juifs de Bordeaux, alors qu'il exerçait la fonction de Secrétaire général de préfecture pendant la Seconde guerre mondiale. Il a été condamné à dix ans de réclusion criminelle.
Il prend alors la fuite en Suisse juste avant l'examen de son pourvoi en cassation en 1999, puis il est arrêté et extradé pour son incarcération. En 2002 , il est remis en liberté en raison de son état de santé. Il meurt en 2007 à 96 ans.
Le ministre argentin des Sciences, Daniel Filmus, maître de la cérémonie mardi à Buenos Aires en présence notamment des ambassadeurs de France et d'Israël, a expliqué à la presse que l'annulation de la décoration de Maurice Papon s'inscrit dans un acte de réciprocité avec la France.
En 2020, le président Emmanuel Macron a signé un décret retirant la médaille de l'Ordre national du mérite français attribuée en 1985 à Ricardo Cavallo, un ancien bourreau argentin, par la suite attaché militaire à l'ambassade d'Argentine à Paris. Le tortionnaire a notamment participé aux sinistres "vols de la mort". Il a été condamné à la perpétuité en 2011 et en 2017, pour des disparitions, détentions arbitraires, actes de barbarie sous la dictature (1976-1983) dont l'assassinat de deux religieuses françaises en 1977.
Charlayne Vilmer
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