Il y a une dizaine de jours, deux émissaires israéliens étaient à Washington pour aborder le dossier. Le conseiller à la Sécurité nationale Tsahi Hanegbi et le ministre chargé des Affaires stratégiques Ron Dermer étaient reçus par le conseiller à la Sécurité Nationale Jake Sullivan à la Maison Blanche. Ils ont expliqué à leur interlocuteur américain pourquoi Israël s'inquiétait de la nouvelle initiative diplomatique conduite par les Etats-Unis et exprimaient leur totale opposition à un tel scénario. L'éventualité d'un compromis, même limité, qui permettrait à l'Iran d'obtenir des concessions des puissances occidentales en échange de son arrêt d'enrichissement d'uranium, le fameux "less for less" (moins d'enrichissement d'uranium contre moins de sanctions), c'est déjà trop pour Jérusalem. Car cela ne suffira pas à stopper l'Iran dans sa marche vers l'arme nucléaire et au mieux le maintiendra au seuil de la capacité nucléaire. Et c'est Benyamin Netanyahou qui est revenu à la charge jeudi dernier, lors de l'appel du Secrétaire d'Etat américain. Le Premier ministre israélien a expliqué à Antony Blinken qu'un accord entre les Etats-Unis et l'Iran ou tout autre accord international avec Téhéran, n'engagerait pas Israël. Et cette semaine, le ministre israélien de la Défense Yoav Gallant doit rencontrer en Europe son homologue américain Lloyd Austin pour lui faire passer le même message.
Or, il devient de plus en plus difficile pour Netanyahou de se faire entendre, alors qu'il n'a toujours pas été invité à la Maison Blanche. Et c'est ce qui l'oblige, faute de mieux, à hausser le ton. Et c'est pour cela que les dirigeants israéliens multiplient depuis quelques semaines, les annonces sur les avancées de l'Iran et leurs propres mises en garde sur le recours à une opération militaire si elle se révélait nécessaire. Mais du même coup, c'est peut-être aussi ce qui pousse les Américains à appuyer sur l'accélérateur dans leurs efforts pour régler le dossier iranien. Car Washington a d'autres priorités stratégiques, à commencer par la Chine et la guerre en Ukraine. Et pour cela, il leur faut faire de la place sur la table et ça passe par la "congélation" du dossier iranien. On le neutralise le temps de s'occuper des autres urgences.
Un des moyens d'y parvenir est de jouer la carte de la normalisation entre Israël et l'Arabie Saoudite. Ça fait justement partie de la stratégie américaine. Et c'est pour cela qu'Antony Blinken est allé voir le prince Mohamad ben Salman à Djedda. Washington pense à une monnaie d'échange ou une compensation, que Jérusalem obtiendrait en acceptant un arrangement international avec l'Iran. Seulement l'Arabie Saoudite pose aussi ses conditions, dont le règlement du conflit israélo-palestinien. Alors même dans l'hypothèse où Riyad se contenterait d'un engagement d'Israël à la création d'un Etat palestinien, on voit mal comment Benyamin Netanyahou pourrait avoir le soutien des partis nationalistes de sa coalition. Et pourtant, un accord de paix avec l'Arabie Saoudite serait pour Netanyahou non seulement un succès historique, mais aussi le retour en grâce auprès de l'administration Biden. Et indirectement, un moyen de contrer la nuisance de l'Iran dans la région.
Pascale Zonszain
Iran ou Arabie Saoudite : le marché des Américains à Israël
Israël.
Publié le 12/06/2023 à 08h55 - Par Gabriel Attal
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