"Adoption de la suppression de la clause de raisonnabilité : quelle suite pour la réforme judiciaire ?", chronique d'Arié Bensemhoun

Israël.

"Adoption de la suppression de la clause de raisonnabilité :  quelle suite pour la réforme judiciaire ?", chronique d'Arié Bensemhoun
(Crédit : DR)
Bonjour Arié. À l’heure où la première mesure de la réforme de la justice a été adoptée, où en est-on du processus législatif à la Knesset ? Bonjour Léa. Lundi dernier, la suppression de la clause de raisonnabilité, mesure très contestée de la réforme judiciaire, a été approuvée par la Knesset en troisième lecture par les 64 élus de la coalition, l’opposition n’ayant pas participé au vote. Cette clause permettait jusqu’à présent à la Cour suprême d’invalider certaines décisions du gouvernement qui lui paraissaient « déraisonnables ». La Cour avait ainsi contraint le gouvernement Netanyahou à démettre de ses fonctions Arié Dery, ex-ministre de la Santé, qui avait été condamné pour fraude fiscale et s’était engagé à se retirer de la vie politique. Depuis six mois, le pays voit s’affronter deux camps aux positions irréconciliables, qui font craindre pour la cohésion nationale. Ceux qui soutiennent la réforme reprochent aux juges des pouvoirs excessifs, qui se sont élargis au fil du temps, tandis que les opposants considèrent la Cour suprême comme un contre-pouvoir, le seul en l’occurrence, qui protège une démocratie sans constitution et où les limites de la séparation des pouvoirs entre le législatif et le judiciaire restent parfois floues et sujets à interprétations.  Jusqu’à la dernière minute, le Président Herzog a tenté d’obtenir un compromis mais le gouvernement comme l’opposition sont restés campés sur leurs positions. « Étape démocratique nécessaire » pour Netanyahou, « honte » pour l’opposition, les débats comme le vote, se sont déroulés dans un contexte particulièrement houleux sur fond de révolte pacifique et populaire.  Il est difficile de voir en quoi la poursuite du processus législatif, qui d’ailleurs n’était pas une promesse de campagne de Netanyahou, pourrait apaiser une situation explosive qui plonge le pays dans une crise inédite, tant elle charrie et réveille toutes les angoisses du peuple juif, particulièrement en cette période de deuil autour du jeûne de Tichea Be Av aujourd’hui, qui rappelle la destruction du Temple et l’exil mais aussi la plupart des malheurs qui ont frappés le peuple juif tout au long de l’Histoire. Si la réforme passe, Israël peut-il perdre le soutien de ses alliés, États-Unis en tête ? Depuis janvier dernier, les États-Unis font part de leurs inquiétudes car ils partagent avec Israël la même identité démocratique, le même attachement à l’État de droit et une certaine vocation universelle. Il faut dire que le spectacle d’une nation fracturée n’envoie pas un bon signal, surtout quand l’institution essentielle qu’est l’armée en vient à sortir de son devoir de réserve, pour alerter sur les dangers que la réforme ferait courir au pays comme l’a fait le Chef d’État-major, dans un message inédit à la nation. Ce sont ainsi des centaines réservistes, la plupart étant issus des hauts rangs de l’armée et des unités d’élite, qui ont indiqué renoncer à participer aux entraînements.  Car la Cour suprême, institution respectée qui jouit d’une immense réputation dans le monde, est un dôme de fer pour l’armée, puisqu’elle borde juridiquement toutes ses opérations et lui assure, notamment à l’international, une protection face aux accusations récurrentes et mensongères de crimes de guerre. Changer les règles du jeu de manière unilatérale, comme le fait le gouvernement, sans rechercher de consensus large entre la majorité et la minorité, est une faute qui fragilise les principes sur lesquels l’État juif a été fondé.  Quels défis attendent les organisations qui promeuvent le renforcement des relations avec Israël, à l’instar d’ELNET ? Il n’est jamais facile d’expliquer et de défendre Israël entouré d’ennemis irréductibles et voué aux gémonies dans les instances internationales, dominées par les dictatures et autres États totalitaires. La tâche est donc plus ardue même si nombre de démocraties dans le monde sont traversées par des crises similaires. C’est pour Israël, l’épreuve de de la maturité, le temps de lever les malentendus et les ambiguïtés qui ont été laissés de côté depuis 75 ans. C’est douloureux et inquiétant, mais Israël saura surmonter cette situation et sortira plus uni et grandi de cette épreuve. Nos ennemis évidemment se frottent les mains, mais ils auraient tort de se réjouir. Israël est là pour durer et pour porter des valeurs éternelles et universelles. Arié Bensemhoun

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