Le gouvernement israélien était très inquiet des risques de terrorisme. « Le sang va couler » prédisait le ministre de la police. Ce sont des documents exceptionnels classés « top secret » qui ont été ouverts au grand public. Les Archives d'État ont en effet autorisé, pour la première fois, la publication du procès-verbal de la réunion historique du gouvernement Rabin, il y a 30 ans, lors de signature des accords d'Oslo. Il s'agit d'une transcription classée "top secrète", répartie sur environ 80 pages. La publication de certaines parties de la transcription reste toutefois interdite pour des raisons ayant trait à la sûreté de l'Etat, et ne pourra avoir lieu que dans 20 ou 60 ans.
Le procès-verbal révèle que, parmi les 18 membres du gouvernement de l'époque, 16 ont voté en faveur de l'approbation des accords d'Oslo et deux se sont abstenus : Aryeh Deri (Shas) et Shimon Shetrit (Parti Travailliste).
Au début de la réunion du cabinet, le défunt Premier ministre Yitzhak Rabin, artisan des accords, avait déclaré : "Il ne s'agit pas d'un accord simple. Chaque accord d'autonomie est complexe en raison des circonstances, non pas dans sa formulation, mais dans la manière dont il est traduit sur le terrain, dans une réalité compliquée... Il comprend aussi des formulations antipathiques. Mais nous devons voir toutes les différentes composantes dans une vision beaucoup plus globale."
L'espoir de vaincre le terrorisme et même de dialoguer avec le Hamas
On apprend que l'ancien ministre des Affaires étrangères, Shimon Peres, était assez enthousiaste : "Il y a un engagement explicite avec la signature de la Déclaration de principes, selon lequel Arafat fera une annonce sur la fin du terrorisme". Il citera les propos du député Fouad Ben Eliezer, selon lesquels, si le roi de Jordanie est parvenu à vaincre le Hamas, l'OLP en sera également capable. Shimon Peres ajoute : "Je le pense aussi, Alors donnez-lui des armes, donnez-lui la police. Regardez dans quelle situation absurde nous sommes : de l'OLP vous prenez la police, tout en laissant des armes au Hamas... Imaginons qu'Asaf Yalim [responsable du Hamas] disparaisse, à qui parlerons-nous ? Avec qui allons-nous négocier ?".
Shimon Peres affirmera que l'évacuation des implantations devra être évitée. "Il est convenu que les colonies resteront telles qu'elles sont, même dans la bande de Gaza … aucune colonie ne sera détruite"
Le scepticisme de l'ancien chef d'état-major Ehud Barak va s’inviter dans la conversation : "Dès la première lecture des accords de principe, je constate des problèmes très graves dans la mise en œuvre de la composante sécuritaire, tant dans la phase de Gaza et de Jéricho, que dans la phase plus lointaine. Dans le texte, la bonne volonté et l'efficacité de la police palestinienne ne sont que des hypothèses (...)
Par la suite, les participants à la réunion évoquent les "personnes déplacées de 1967", faisant référence aux Arabes ayant fui Jérusalem-Est au cours de la Guerre des Six jours. Les membres du cabinet affirment qu’elles ne pourront pas participer aux élections.
Les sombres prédictions du ministre de la Police en ce 13 septembre 1993
Le tour de table historique se poursuit avec le ministre de la Police, Moshe Shachal prédira que le niveau de criminalité augmentera en raison de la coopération entre les criminels israéliens et palestiniens, et évoque la nécessité de parvenir à un accord entre les forces de police. "L'atmosphère laisse penser que le sang pourrait couler", avance le ministre de la Police. Il poursuit en citant les propos de Benjamin Netanyahou à la télévision la veille , qui avait affirmé : "Nous arrêterons le processus [d'Oslo], nous avons le pouvoir de l'arrêter". Page d’histoire assez exceptionnelle , deux ans plus tard le premier ministre Rabin était assassiné.
Michel Zerbib
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