Qui est Javier Milei, le «Trump de la pampa», nouveau président argentin?

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Qui est Javier Milei, le «Trump de la pampa», nouveau président argentin?
Le président argentin, Javier Milei - DR

Polémiste prisé des plateaux TV depuis des années, mais surgi en politique il y a deux ans, Milei, 53 ans, a promis de refaire de l’Argentine «une puissance mondiale». C’est Javier Milei, nouveau venu dans la vie politique argentine, qui est le nouveau président de l’Argentine, après sa retentissante victoire dimanche à la présidentielle. 

Une victoire qui ouvre une période d’incertitude pour la 3e économie d’Amérique latine, à laquelle il promet une thérapie de choc

Javier Milei est entré en politique il y a deux ans en se faisant élire député de Buenos Aires. Il a créé son propre parti, La libertad avanza (La liberté avance), et veut s’afficher en rupture avec les partis traditionnels. Il se réclame de la lignée de Jair Bolsonaro et de Donald Trump et admire Margaret Thatcher, même si cette dernière avait déclaré la guerre à l’Argentine en 1982.

Le programme de Javier Milei est ultra-libéral: il veut supprimer les ministères de l’Éducation, du Droit des femmes, du Travail, de la Solidarité, de la Santé, des Transports

Il promet de supprimer toutes les aides sociales qui sont un «encouragement à la paresse». Il veut «détruire à la tronçonneuse» la banque centrale, faire disparaître le peso argentin pour dollariser l’économie. Il estime qu’il faut «légaliser la vente d’organes», source de revenus potentielle pour les plus pauvres.

Promoteur de l’autodéfense, il souhaite libéraliser la vente d’armes. Il promet d’interdire l’avortement qui vient d’être légalisé dans le pays. Il s’oppose à toute politique de défense des minorités sexuelles et ethniques. Tout cela pour que l’Argentine «redevienne la première puissance mondiale comme au début du XXe siècle», selon sa vision de l’Histoire. Javier Milei est par ailleurs très opposé à son compatriote, le pape François, qui représente «le mal sur la terre» et «a voulu imposer le communisme».

Javier Milei est apparu sur la scène médiatique en 2015 après l’élection de Roberto Macri, représentant de la coalition de droite, à la présidence. Personnage haut en colère

Tout d’un coup, cet homme, assez réservé jusque-là selon son entourage, se révèle devant les caméras. Il devient rapidement «le bon client des médias» pour son côté iconoclaste. Il construit petit à petit son image de perturbateur, avec sa coiffure de rocker, sa voix grave et rocailleuse, et ses colères sur les plateaux de télévision à la moindre contradiction. On ne lui connaît aucune relation amoureuse. «La sexualité normale est horrible,» explique-t-il. Il se dit adepte d’une «sexualité tantrique», dans une version qui prône l’abstinence, qui serait une preuve de sa capacité à contrôler son corps.

Les seules femmes avec lesquelles il a vécu sont sa mère et sa sœur Karina, et sa relation complexe avec les figures d’autorité reste marquée par les coups que lui assénait, enfant, son père, Norberto, sous le regard passif de sa mère. Javier Milei multiplie les séances de spiritisme, qui lui permettraient aussi de communiquer avec le «Numéro Un», c’est-à-dire Dieu. Et Dieu lui aurait envoyé un message: «Tu dois être président en 2023.»

Javier Milei n’est pas arrivé au second tour de la présidentielle par hasard

Il a d’abord été poussé sur les plateaux de télévision par son patron d’Aeropuerto 2000 pour contrer le président de droite de l’époque, Mauricio Macri. C’est ensuite Sergio Massa, son adversaire aujourd’hui, qui a utilisé la puissance et les finances du parti péroniste pour promouvoir la candidature de Milei et empêcher la candidate de droite à la présidentielle, Patricia Bullrich, de se qualifier au second tour. Pour Massa, il semblait plus facile d’être opposé à un «outsider» comme Milei. Il n’avait pas anticipé l’ampleur du rejet par la société argentine des partis politiques traditionnels, ni la capacité de séduction d’un personnage comme Milei dans une société traumatisée par la pandémie et la crise économique.

Peut-être pour renforcer son côté iconoclaste, Javier Milei a choisi Victoria Villarruel comme colistière, pour la vice-présidence. Fille et nièce de militaires, elle relativise les crimes de la dictature (1976-1983). Elle veut «rendre au peuple» les 17 hectares de l’École de mécanique de la marine (Esma) dans la capitale, le plus tristement célèbre centre de détention et de torture de la dictature et qui est aujourd’hui un lieu de mémoire.

«Bertolt Brecht disait que la crise survient quand le vieux ne meurt pas et que le nouveau ne naît pas, rappelle Marcelo Bermolen, directeur de l’Observatoire de la qualité institutionnelle de l’université Austral. Et Gramsci ajoutait que c’est dans ces moments que la société produit des monstres. L’Argentine a choisi en tous les cas ce personnage hors normes qui promet beaucoup de «  liberté ».

Michel Zerbib

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