L’Allemagne envisage une interdiction de son parti d’extrême droite

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L’Allemagne envisage une interdiction de son parti d’extrême droite
La présidente de l'AfD, Alice Weidel - X

En Europe et en Allemagne, force est de constater que la menace islamiste ou islamogauchiste n’est pas la seule à peser sur les sociétés du continent. Une extrême droite puissante fait l’actualité en Allemagne et a fait sortir dans la rue allemande des manifestants inquiets de voir le retour du « fascisme » en terre allemande.

Des milliers de personnes ont manifesté ce week-end pour réclamer l’interdiction de l’Alternative pour l’Allemagne, dont la «remigration» figure notamment dans son programme pour les élections européennes de juin prochain

À l’origine de cette réaction, les révélations du site d’investigation Correctiv, selon lesquelles des responsables de l’AfD, des identitaires, des néonazis et de riches entrepreneurs se sont réunis fin novembre dans un pavillon de chasse de Potsdam, dans la banlieue cossue de Berlin.

L’objet de la rencontre clandestine, avec l’ancien chef du mouvement identitaire autrichien Martin Sellner en invité d’honneur, a porté sur l’élaboration d’un «plan stratégique pour la remigration» de millions d’«éléments non-assimilés» 

En clair, il s’agissait de définir les conditions de l’expulsion de demandeurs d’asile, puis d’Allemands d’origine étrangère, vers un pays d’Afrique du Nord. 

Pour la presse allemande ce n’est pas sans rappeler le «plan Madagascar» prévu par les nazis pour les Juifs en 1940

L’ancien pavillon de chasse reconverti en lieu de réception est à quelques encablures de la villa de la Conférence de Wannsee dans laquelle des dignitaires nazis avaient en 1942 planifié la «solution finale». Cet «hôtel particulier de la conspiration», comme l’a surnommé la presse allemande, a servi de décor pour Babylon Berlin , la série de Netflix sur la montée du nazisme dans le Berlin des années 1930.

Le concept d’un peuple homogène fait déjà partie des éléments de langage de «l’Alternative»de l’Afd, et la «remigration» figure dans son programme pour les élections européennes de juin prochain

La radicalisation du parti s’accompagne d’une popularité spectaculaire : 36% des électeurs de Thuringe, 34% de ceux de Saxe et 32% de ceux du Brandebourg envisagent de voter pour l’AfD, selon le dernier sondage Forsa-RTL. Trois Länder appelés à voter en septembre prochain, dans lesquels les fédérations régionales du parti «mettent en danger l’ordre constitutionnel». Une qualification attribuée par le Verfassungsschutz, l’office de protection de la Constitution dont le président, Thomas Haldenwang, n’a de cesse d’appeler «la majorité silencieuse à se réveiller et à prendre position contre l’extrémisme en Allemagne».

Cette radicalisation de l’extrême droite allemande a relancé l’idée d’une interdiction qui ne sera pas aisée voire même souhaitable

La ministre allemande de l’Intérieur, Nancy Faeser (SPD), a fustigé les «plans d’exclusion racistes» révélés dans Correctiv, qu’Olaf Scholz, a qualifié de «violation de la Constitution». Le chancelier comme le chef de l’opposition, Friedrich Merz, sont cependant réticents à s’engager en faveur d’un «AfD-Verbot».

D’autres opposants pointent les risques d’une procédure à l’issue incertaine, comme l’a confirmé la tentative avortée en 2017 contre le parti néo-nazi NPD, qui permettrait à l’AfD de prospérer dans sa position favorite, celle du martyr. 

Toujours est il qu’une interdiction sera sérieusement étudiée :  avec une motion du groupe SPD la semaine prochaine au Bundestag. Lancée puis instruite au Parlement, la procédure d’interdiction serait jugée par la Cour constitutionnelle.

Michel Zerbib

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