Décès de Nina Gottlieb, survivante de la Shoah et héroïne d’un documentaire primé

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Décès de Nina Gottlieb, survivante de la Shoah et héroïne d’un documentaire primé
Daniel Lombroso, deuxième à partir de la droite, avec sa grand-mère Nina Gottlieb, au centre, sur le tournage de « Nina et Irena » - Autorisation

Nina Gottlieb, qui a brisé 80 ans de silence sur son vécu de la Shoah dans un documentaire primé diffusé en 2023, est décédée le 4 février à Manhasset, dans l’État de New York. Elle avait 91 ans.

Dans « Nina & Irena », film new-yorkais réalisé par son petit-fils Daniel Lombroso, Gottlieb se confiait sur son enfance à Kielce, en Pologne, et sur sa relation avec sa sœur, Irena. Elle racontait y avoir perdu 25 membres de sa famille, dont Irena. Seuls ses parents et elle ont survécu.

Ce film, sorti sur les écrans du Musée du patrimoine juif de New York en juillet 2023, a été couronné de succès dans les festivals et a notamment remporté le prix du meilleur court-métrage au Festival du film de montagne de Telluride. Il figure sur la « short List » du festival de documentaires DOC NYC pour les Oscars et d’autres prix encore.

En décembre, Gottlieb avait été invitée à célébrer Hanoukka avec Kamala Harris à la résidence de la vice-présidente à Washington, D.C.

« Le film évoque la richesse de sa vie », expliquait à la JTA en 2023 Lombroso. « Il y a une certaine fatigue de la Shoah : nous avons grandi avec beaucoup de films sur la Shoah et de témoignages des survivants. On a des idées précises sur la question. On s’attend à des voies ferrées, Auschwitz, de la fumée. Je ne voulais pas nécessairement éviter de parler des horreurs – car il faut pouvoir comprendre – mais je voulais aussi faire sa place aux côtés plus légers de sa vie. Elle est tellement drôle. »

Janina Vogel est née le 11 juillet 1932 à Kielce : elle avait 7 ans lorsqu’Hitler a envahi le pays. Ses proches ont dû rejoindre le ghetto de Varsovie et ont survécu, dit-elle dans le film, grâce à la capacité de son père à se tirer des mauvais pas. Irena, de six ans son aînée, avait pris un train pour l’Ukraine à la recherche d’autres membres de sa famille : on n’a plus jamais entendu parler d’elle.

Après la guerre, elle a vécu avec ses parents à Prague et Paris, et a fini par arriver aux États-Unis en 1951. Elle y a rencontré Stan Gottlieb, sur la plage de Brighton, à Brooklyn, en 1952 et l’a épousé en 1953. Elle a vécu à Brooklyn et dans le Queens avant de s’installer à Port Washington, New York en 1967. Elle a été comptable et contrôleuse, notamment au sein de l’American Jewish Joint Distribution Committee avant de prendre le temps d’élever ses deux enfants. Au début des années 1970, elle a repris le travail chez Alfred Publishing, le fabricant Utensco et K Design Interiors.

Dans sa nécrologie, ses proches évoquent une excellente joueuse de bridge doublée d’une amoureuse des plantes d’intérieur et des oiseaux, qu’elle nourrissait dans le jardin de sa maison de Long Island, où elle vivait seule depuis la mort de son mari en 2008.

Gottlieb laisse dans la peine ses enfants, Linda et Larry, ses six petits-enfants et cinq arrière-petits-enfants.

Dans l’émission PBS « Amanpour & Company » diffusée en novembre 2023, l’animateur Hari Sreenivasan lui demandait pour quelle raison elle n’avait pas parlé de ce qu’elle avait vécu avant que Lombroso ne lui propose de faire ce film.

« Cela n’intéressait personne, vous savez. Personne ne parlait de la Shoah », lui avait-elle répondu. « Je disais plus tard, plus tard, plus tard, plus tard. Finalement, plus tard, c’est quand mon petit-fils a décidé de raconter cette histoire. Et c’est ce qu’il a fait. »

Gabriel Attal

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