Cet ouvrage autoédité d’une centaine de pages raconte l’étrange histoire d’un homme d’affaires américain juif, qui a découvert son amour pour Jésus-Christ. Selon Le Figaro depuis deux semaines, des milliers d’enveloppes violettes, ornées d’étoiles, ont été déposées dans des boîtes aux lettres à Paris. «Ouvrez pour lire une passionnante histoire de transformation», est-il écrit sur la missive, sur laquelle on voit une photo ancienne d’un enfant souriant, se tenant la tête avec les deux mains. En ouvrant le paquet, les Parisiens ont pu découvrir un petit livre violet d’une centaine de pages, autoédité, avec la même photo d’enfant en couverture : il s’agit de l’auteur, Tom Cantor, lorsqu’il était âgé de 8 ans. Son livre s’intitule «Transformé». Sur la quatrième, l’écrivain nous invite à «rejoindre le voyage d’un homme qui est passé de perdu et souillé» à «être retrouvé et purifié».
Le quotidien Le Figaro a enquêté sur cet étrange ouvrage distribué dans plusieurs arrondissements de Paris
Un résident du 20e partage son inquiétude : «On est un peu inquiets à l’idée d’avoir reçu un livre, directement dans notre boîte aux lettres, qui parle de se purifier et se restaurer après avoir été perdu et souillé. On a peur d’avoir été ciblés car on est deux hommes». Selon un troisième, une boîte de distribution de prospectus - et non La Poste, les enveloppes n’ayant aucun timbre - distribuerait directement les livres. Un moyen d’avoir accès aux immeubles, outrepassant les codes d’entrée.
Plongé dans la souillure sexuelle
Qui est Tom Cantor ? Il se présente comme né de parents juifs - son père aurait été un gynécologue obstétricien de Beverly Hills, sa mère «travaillait pour des célébrités notables de Hollywood» -, et serait le petit-fils d’un rabbin orthodoxe d’une lignée lituanienne. «À l’âge de 15 ans, Tom aspirait à un foyer stable, un chez-soi», raconte-t-il. Exclu de son école, il dit avoir finalement obtenu un diplôme de fin d’études en Suisse. Avant de fonder en 1976 les laboratoires Scantibodies, une entreprise américaine spécialisée dans les biotechnologies, qui développe des produits censés arrêter l’évolution de certaines maladies.
Mais la clef de la transformation de Tom Cantor serait intervenue dans sa jeunesse. En Europe, lors de ses études, il aurait «franchi les limites de la moralité» et se serait «plongé dans la souillure sexuelle». Afin de «se sauver de la culpabilité et de la honte», il aurait «choisi de nouer une relation avec une fille pure et saine», Cheryl. Avant d’être «désabusé et dévasté quand, au moment où il a fait sa demande en mariage, il a appris que sa future épouse avait été violée et était enceinte». C’est là le premier thème de son livre : évoquer le viol de sa compagne, un «sombre secret» qu’il aurait caché pendant «cinquante ans». «J’en suis arrivé à comprendre combien il est pénible et aliénant de fuir la vérité», dit-il dans sa préface.
Ainsi selon l’auteur , Cheryl, en raison de son viol, aurait été victime de syndromes post-traumatiques. «Elle avait été souillée. Elle était “abîmée”», fustige-t-il, regrettant que «tout espoir» de se «rétablir par son contact avait été brisé le jour où elle avait été violée et perdu son innocence».
Tom serait ensuite tombé en dépression. Jusqu’à ce qu’il se mette à étudier les textes de la Bible. Il voulait «avoir Jésus Christ dans sa vie», tout en restant Juif.
Après la naissance de l’enfant de Cheryl - issu de son viol, et qui a été placé en famille d’accueil -, Tom s’est rendu dans des synagogues, pour y affirmer que «Jésus était peut-être le Messie». Provoquant l’ire des rabbins. Il est donc allé trouver un pasteur pour prier, et réciter Luc 19:10. Il est devenu une sorte de « Juif pour Jesus » une secte que l’on rencontre parfois dans les rues de Paris.
Pourquoi Tom Cantor a-t-il décidé de distribuer des livres aux Parisiens ? L’homme d’affaires, prononce régulièrement des sermons au sein d’une chapelle chrétienne basée à San Diego. Fin décembre, il révélait s’apprêter à «évangéliser» la capitale, en y distribuant près de 670.000 exemplaires de son ouvrage. En 2022, Cantor avait inondé New York de son autobiographie.
Interrogé par le New York Post , il avait confié l’avoir rédigée en 2010, alors qu’il était atteint d’un cancer. «Je veux qu’ils trouvent ce que j’ai trouvé. J’ai trouvé le remède contre le cancer spirituel» En 2023, la ville de Chicago avait été ciblée par l’auteur, qui se définit désormais comme un «Juif qui croit en Jésus Christ».
En Israël, où quatre millions d’exemplaires auraient été envoyés à l’été 2023, l’organisation juive orthodoxe Yad LeAhim s’était indignée du contenu de l’ouvrage, publiant des avertissements dans les lieux publics
Quelques réactions de lecteurs rapportés par Le Figaro :«C’est l’histoire d’un homme qui, après 50 ans et deux grandes religions, n’a toujours pas réussi à trouver le moyen de respecter sa femme en tant qu’être humain». «J'ai été absolument horrifiée par ce que j'ai découvert : un homme qui ne fait que dire à quel point sa vie a été terrible parce que sa fiancée est tombée enceinte à la suite d'un viol. Un troisième évoque une «horrible propagande de conversion», tandis qu’un autre qualifie ces 85 pages de «brûlot antisémite».
Cantor cherche-t-il à convertir les Juifs ?
L’homme d'affaires a créé une organisation, les «ministères de restauration d'Israël», pour encourager la croyance en Jésus Christ en tant que Messie juif. Mais, malgré ses nombreuses campagnes de propagande, aucun groupe ethnique ou religieux ne semble avoir été particulièrement visé par les envois dans les boîtes aux lettres à Paris .
Dans certaines enveloppes reçues à Paris, on trouvait, en plus de l’autobiographie, un tract avec un QR code. Celui-ci dirigeait vers le site d’Angel studios, une société de production et de distribution de films chrétiens, à l’origine récemment de la série Netflix The Chosen , sur la vie de Jésus.
MZ
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