La fièvre physiologique deviendrait-elle politique ? La classe politique israélienne semble avoir de plus en plus de mal à conserver son sang-froid, alors que les échéances institutionnelles se font plus pressantes. Notamment pour la nouvelle Knesset, investie en début de semaine.
Indépendamment des consignes sanitaires liées au coronavirus, le Parlement a besoin, pour pouvoir fonctionner, de désigner les membres de ses nouvelles commissions. Pour cela, il faut que l'assemblée plénière commence par élire une commission dite des arrangements. C'est à partir de cet organe, que tout le reste se mettra en place. En temps normal, c'est l'affaire d'un simple accord entre élus de la majorité et de l'opposition. Sauf que l'on n'est pas en temps normal. Que ce soit sur le plan sanitaire ou sur le plan politique.
Dimanche, 61 députés ont recommandé au président de l'Etat de désigner Benny Gantz pour former le gouvernement. Ce que Reuven Rivlin a fait le lendemain. Mais le Likoud estime que puisqu'il est arrivé en tête des suffrages, il ne peut pas être relégué dans l'opposition et que sa majorité relative doit se traduire dans la composition des commissions parlementaires. Le groupe de Benyamin Netanyahou cherche donc à gagner du temps, estimant que le leader du parti centriste ne parviendra pas à former une coalition et qu'il pourra ensuite reprendre la main.
Le président sortant de la Knesset, Yuli Edelstein, lui-même élu du Likoud, est aussi de cet avis. C'est ce qui l'a conduit mercredi, à ajourner la séance de l'assemblée plénière pour la reporter au 23 mars. Mais sa décision a été interprétée par le parti Bleu Blanc comme une manœuvre illicite, d'autant que les centristes escomptent bien remplacer Edelstein au perchoir par un de leurs députés. Le système israélien n'est pas le système américain où le parti qui remporte une manche remporte tout le reste, affirme Yuli Edelstein.
Machine politique grippée
Le bloc de droite reste convaincu que les centristes ne doivent pas passer un accord de coalition qui inclurait les députés arabes et que cette majorité, qu'ils considèrent comme artificielle, mettrait en péril la démocratie israélienne. C'est l'entêtement à bloquer le processus parlementaire qui est une atteinte à la démocratie, leur répondent les centristes.
Résultat : la machine politique est grippée et la fièvre monte, au propre comme au figuré. Car il est clair qu'après un an et demi de paralysie institutionnelle et trois scrutins qui n'ont pas départagé les forces en présence, la classe politique israélienne est à bout de nerfs. Et les mesures urgentes qu'impose la lutte contre l'épidémie de Covid-19 ajoutent encore aux tensions. Il est indéniable que les mesures d'exception décidées par le gouvernement de transition pour contenir le virus sont légitimes, comme l'est le cabinet qui les a prises. En revanche, cela ne doit pas empêcher le parlement de remplir sa mission normale de vote des lois et de contrôle du pouvoir exécutif pour s'assurer qu'il n'outrepasse pas ses compétences, car c'est le fonctionnement normal d'une démocratie.
Considérant que ce principe est au cœur des préoccupations de Benyamin Netanyahou comme de Benny Gantz, c'est à eux à faire retomber d'urgence la fièvre politique. Car le virus n'attend pas.
Pascale Zonzsain
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