En Israël, on l'appelle l'affaire des sous-marins, ou encore dossier 3000, selon son nom à la police. Tout commence en 2009. A l'époque, Israël a découvert ses champs gaziers au large de la côte méditerranéenne. Vu leur future importance stratégique, il faut prévoir de protéger leur exploitation en conséquence. D'où le projet de doter la marine de Tsahal de trois sous-marins Dolphin supplémentaires, puis de 4 corvettes. Il faut rappeler que c'est l'Allemagne qui a déjà participé à la construction des cinq premiers sous-marins en service dans la flotte israélienne. Le représentant en Israël du groupe allemand Thyssenkrupp, un proche du commandant de la marine israélienne de l'époque, l'amiral Eliezer Merom, aurait alors usé de son influence pour que sa société soit favorisée et remporte la commande. Un marché d'une valeur totale de quelque deux milliards d'euros. Le premier sous-marin est formellement commandé par le gouvernement israélien à ThyssenKrupp en 2012.
En 2016, le gouvernement envisage la commande des deux autres sous-marins, contre l'avis du ministre de la Défense de l'époque, Moshe Yaalon et d'une partie des responsables de la défense israélienne. La même année, le gouvernement annule l'appel d'offres pour les quatre corvettes et confie le marché au groupe allemand.
Fin 2016, la presse israélienne révèle l'affaire qui impliquerait notamment des proches du Premier ministre Benyamin Netanyahou. Une enquête est ouverte l’année suivante. Tous les acteurs concernés sont entendus, y compris d'ailleurs Netanyahou. Le Conseiller Juridique du Gouvernement, qui est aussi le Procureur Général conclura alors que Benyamin Netanyahou n'est pas impliqué dans l'affaire des sous-marins et qu'il n'y a aucune charge à retenir contre lui.
Mais dans ce dossier à tiroirs, les choses ne s'arrêtent pas là. L'année dernière, d'autres éléments fuitent vers la presse. Benyamin Netanyahou a détenu pendant un temps des actions d'une société liée à ThyssenKrupp. Et les versions diffèrent sur la date à laquelle Netanyahou a acheté puis revendu ces actions. L'intéressé affirme les avoir achetés à un moment où il n'était ni député ni ministre, mais il les aurait vendues en 2010, quelques mois après être devenu chef du gouvernement israélien. D'où la question d'un possible conflit d'intérêts. Pourtant, il y a à peine quelques jours, le Conseiller Juridique du Gouvernement, Avichaï Mandelblit a rendu un nouvel avis, affirmant qu'il n'y avait pas, là non plus, de charges à retenir contre Netanyahou.
Mais l'affaire continue à produire des remous, alors que le procès n'a pas encore commencé. L'opposition israélienne réclame donc la création d'une commission d'enquête parlementaire. C'est ce vote hier qui a été invalidé par le président de la Knesset, suscitant la fureur des députés d'opposition, qui veulent porter saisir la Cour Suprême. Et l'affaire est même devenue un emblème de la contestation, dont des maquettes de sous-marins en carton sont brandies, à côté des drapeaux noirs et des banderoles dans les manifestations qui appellent depuis des mois, à la démission du Premier ministre israélien.
Pascale Zonszain
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