Si les autorités israéliennes commencent à mieux gérer la crise sanitaire dans la communauté ultra-orthodoxe, le problème est encore loin d'être sous contrôle dans la population arabe israélienne.
La diffusion des consignes de confinement, d'hygiène et de dépistage a d'abord tardé à être traduite en arabe, ce qui a décalé d'autant la prise de conscience dans le secteur arabe. Comme avec les Juifs ultra-orthodoxes, le décalage a également été culturel. La population arabe, également plus pauvre que la moyenne israélienne, vit dans des agglomérations à forte densité, ce qui augmente le risque de contagion. C'est aussi une communauté dont la vie sociale se déroule beaucoup à l'extérieur, ce qui multiplie les points de contact entre personnes saines et malades, qui n'ont pas encore été diagnostiquées.
Autre obstacle culturel, la honte de la maladie. Les Arabes considèrent comme un signe de faiblesse ou d'échec de reconnaitre avoir été contaminés et préfèrent souvent rester dans le déni. Le même phénomène avait été constaté avec le virus du sida. Il est donc important d'adapter le message institutionnel pour sensibiliser la population arabe.
Même si en Israël, une part non négligeable du personnel soignant, infirmiers, pharmaciens, mais aussi médecins, sont des Arabes israéliens, les infrastructures médicales sont souvent insuffisantes dans le secteur arabe, qui manque notamment de dispensaires. Le problème est particulièrement aigu dans le sud d'Israël, où vivent la majorité des Bédouins. Dans la région du Néguev, de nombreux villages non reconnus, n'ont pas de centres de soins, ni souvent d'habitations offrant les conditions d'hygiène nécessaires ni de possibilité de confinement. Or, le nombre de malades recensés est anormalement bas, considérant les chiffres des localités juives voisines, pour un secteur qui représente 20% de la population. Le Magen David Adom a donc mis sur pied un centre de dépistage mobile qui a commencé à fonctionner en Galilée, et un autre doit être ouvert à Rahat, la principale localité bédouine du Néguev. Le ministère de la Santé prévoit aussi la mise à disposition d'un hôtel pour accueillir les Arabes qui ne peuvent maintenir les conditions de quarantaine chez eux.
Enfin se pose le cas particulier de Jérusalem. Le maire de la capitale israélienne réclame l'ouverture d'un centre de diagnostic dans la partie arabe de la ville. Car là encore, les chiffres ne correspondent pas à la réalité, quand des centaines de cas sont diagnostiqués dans les quartiers juifs qui comptent plus de 600.000 habitants et moins d'une vingtaine pour les quartiers arabes qui comptent 330.000 habitants. Sans compter le problème de sécurité des personnels médicaux qui n'entrent plus dans les quartiers arabes situés à l'extérieur de la barrière de sécurité. Plusieurs milliers de personnes sont d'ailleurs supposées avoir rejoint le quartier arabe de la vieille ville, par crainte de ne plus avoir accès à des soins.
Les chiffres réels de la contamination au Covid-19 en Israël risquent donc d'être revus à la hausse, quand la situation épidémiologique du secteur arabe pourra être totalement clarifiée. Mais la population arabe elle aussi, a commencé à prendre conscience de la gravité de la situation. Même les députés arabes de la Knesset se sont mobilisés pour sensibiliser leur électorat et appellent à respecter les consignes du ministère de la Santé.
Pascale Zonszain
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