Pourquoi le coronavirus ravive la polémique contre les harédim

Israël.

Pourquoi le coronavirus ravive la polémique contre les harédim
Le coronavirus ravive la flamme contre les orthodoxes (Crédit: DR)

Les Israéliens ont parfois du mal à se comprendre entre eux. L'épidémie de coronavirus est venue rappeler le fossé culturel et surtout social qui sépare la communauté ultra-orthodoxe du reste du pays. Deux mondes qui se croisent sans se connaitre vraiment, viennent de se télescoper avec la crise sanitaire.

Les chiffres de l'épidémie confirment que les agglomérations et les centres de population ultra-orthodoxes sont les plus touchés. Avec plus de 1.300 malades, Jérusalem est en tête de liste, suivie par Bnei Brak avec 1.200 malades recensés au 5 avril, avec respectivement 40 et 30% de hausse en l'espace de trois jours. D'autres localités à population harédite, comme Elad, Modiin Ilit, Beth Shemesh ou Kyriat Yearim sont aussi proportionnellement d'importants foyers de Covid-19.

On sait qu'au début de l'épidémie, le public harédi n'a pas suivi les consignes du gouvernement, car il a d'abord écouté la parole de ses rabbins, qui ont préféré minimiser le danger. Souvent perçus comme un groupe en marge par la majorité du public israélien, les ultra-orthodoxes sont rapidement devenus la cible de toutes les critiques. On les a tenus pour responsables de la contagion par leur rejet de principe de l'autorité de l'Etat. Comme si ces harédim vivaient sans se soucier de leurs voisins et de leurs concitoyens, dans une sorte de trou noir.

C'est une erreur de perception, due principalement à une méconnaissance de leur culture, qui est tout sauf chaotique ou anarchique. Même les courants les plus fondamentalistes et les plus extrémistes fonctionnent en communauté disciplinée, où le rabbin ou l'Admor est l'autorité compétente qui dicte la règle à suivre. De plus, ces différentes communautés sont organisées autour de l'entraide et de la responsabilité mutuelle. L'aide aux membres les plus vulnérables de la communauté, personnes âgées, malades, familles démunies, est au centre de la vie sociale. Le revers de la médaille est évidemment que ces groupes, pour préserver  leur mode de vie, se retranchent du monde extérieur. Même quand les informations parviennent jusqu'à eux, elles doivent être validées par leurs chefs spirituels pour devenir réelles.

La majeure partie du public israélien ne connait souvent du monde harédi que son aspect extérieur, folklorique en quelque sorte. De leur côté, les ultra-orthodoxes perçoivent ceux qui ne suivent pas les mêmes règles qu'eux comme des menaces pour leur système de valeurs. Mais à l'exception de quelques bouffées délirantes qui ont pu se manifester ici ou là, l'écrasante majorité des harédim a compris la gravité de la situation et se soumet aux consignes de confinement et aux mesures sanitaires imposées par les autorités. Précisément par un sens aigu de responsabilité mutuelle, qui les oblige pourtant à renoncer, en tout cas provisoirement, à ce qui fait l'essence de leur judaïsme : la vie en communauté.

Il est probable que cette crise sans précédent aura des retombées à long terme pour les ultra-orthodoxes. Cette fois, ils ont pris la mesure que leur vie en Israël est liée à celle de leurs compatriotes et qu'ils ne peuvent plus continuer à se couper du pays où ils vivent. Les rabbins eux aussi devront comprendre que l'Etat juif est une réalité qu'ils ne peuvent continuer à ignorer. Le reste du public israélien quant à lui, aura pu constater que les harédim ne sont pas des extra-terrestres. Ils sont leurs voisins du bout de la rue.

Pascale Zonszain

PZOOM060420

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