La gauche israélienne, on le sait, est en mauvaise posture. C'est vraiment du bout des lèvres que le parti Travailliste et Meretz ont finalement accepté de faire liste commune, comme moyen d'éviter que l'un des deux n'atteigne pas le seuil de représentativité au Parlement.
L'alliance électorale des deux partis devrait permettre à leur liste commune d'arriver à 9 ou 10 mandats aux élections du 2 mars, selon les sondages de ces derniers jours. Le parti Travailliste, comme le Meretz sont des partis sionistes, ce qui ne les a jamais empêchés de présenter des candidats arabes, qui ont d'ailleurs siégé sous leurs couleurs à la Knesset. Si le Parti Travailliste n'a plus d'élu arabe depuis 2019, le Meretz avait encore réussi à aligner un élu arabe aux élections d'avril dernier.
Si les électeurs arabes votent majoritairement pour les partis de leur secteur, il reste toujours un électorat marginal pour les partis sionistes, de préférence à gauche, mais pas de manière systématique. Sont privilégiés par une frange de l'électorat arabe les partis susceptibles d'améliorer les conditions de leur communauté.
Mais à gauche, se pose un problème supplémentaire. Pour le parti travailliste, une partie de son électorat traditionnel a migré vers la droite au bénéfice du parti centriste. Pour le Meretz, plus à gauche que les Travaillistes, le positionnement idéologique manque de clarté, ce qui nuit au renouvellement de son électorat. Or, on assiste à une nouvelle tendance qui se dessine dans une partie de la gauche israélienne, qui, à travers l'activisme social et laïque, privilégie de plus en plus l'égalité de tous ses citoyens au détriment du caractère juif de l'Etat. L'égalité entre Juifs et Arabes fait d'ailleurs l'objet d'une réflexion vers la création d'un parti judéo-arabe, qui ne serait donc plus spécifiquement sioniste.
Ce sont les électeurs juifs qui suivent cette tendance qui pourraient être tentés de voter en mars pour la Liste Arabe Unifiée, puisqu'ils ne pourront plus compter sur le Meretz pour avoir une représentation arabe de gauche à la Knesset. Et c'est bien là-dessus que mise la Liste arabe pour gonfler son électorat. Même s'il ne s'agit que de quelques dizaines de milliers de voix, cela peut être décisif pour compléter un siège supplémentaire au parlement.
Quant aux électeurs arabes qui avaient voté Meretz en avril, ils étaient déjà moins nombreux en septembre et devraient cette fois revenir vers leur parti sectoriel. Ceux en revanche qui estiment plus utile de voter pour un parti susceptible de former le prochain gouvernement, choisiront probablement de voter pour le parti centriste.
Mais dans tous les cas, l'affaiblissement annoncé des partis de gauche fait les affaires de la Liste Arabe, qui y voit l'occasion d'être en position de force face aux centristes de Kah'ol Lavan et de pouvoir influer sur sa politique. Ahmed Tibi en a déjà donné un avant-goût en avertissant le leader centriste Benny Gantz, qu'il se retrouverait à la tête de l'opposition, s'il soutenait l'annexion de la Dépression du Jourdain.
Pascale Zonszain
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