Dans sa chronique ce jeudi matin à 7h10, le journaliste et DJ, Ariel Wizman, est revenu sur la politique française à moins d'un an de l'élection présidentielle dans le Morning de Radio J.
Je sais que je risque d’en choquer certains ce matin mais je voudrais pointer une réalité théologique simple: Les valeurs juives sont de gauche. Dois-je les détailler ? L’amour de l’autre, le respect de l’étranger, l’accent sur le péché originel de la mise en esclavage d’autrui, le maasser, la tsedaka, la remise des dettes, l’interdiction de glaner les coins de son champ, l’obligation de verser son salaire à l’employé indigent le soir même, l’interdiction de confisquer une couverture à un indigent, l’assistance à la veuve et à l’orphelin et je pourrais continuer très longtemps.
La leçon que l’on pourrait en tirer pour le temps présent serait qu’il ne peut y avoir de marché déconnecté de l’éthique, que la dureté inhérente au marché doit obligatoirement s’accompagner de considération, que la "main invisible" du marché ne peut être totalement détachée de celle de D.ieu, qui s’ouvre et dispense la subsistance.
Nos sages définissent l’argent comme une sorte de folie collective qui fait courir le risque d’une dégradation de l’âme profonde de l’homme. Combien nos sages ou même Adam Smith lui même, seraient affolés de voir les crash, les abus de l’industrie du crédit, l’érection d’un nouveau Dieu Bitcoin, tout en spéculation et en calcul, valeur détachée de la création, et qui enrichit l’un et ruine l’autre aux rythmes des sautes d’humeur des idoles algorithmiques.
Ajoutons le passage d’Isaïe, si important que nous le lisons à l’office du matin du Yom Kippour. Je cite: Mais voici le jeûne que j'aime: c'est de rompre les chaînes de l'injustice, de dénouer les liens de tous les jougs, de renvoyer libres ceux qu'on opprime, de briser enfin toute servitude,
puis encore, de partager ton pain avec l'affamé, de recueillir dans ta maison les malheureux sans asile; quand tu vois un homme nu, de le couvrir, de ne jamais te dérober à ceux qui sont comme ta propre chair! Le prophète révolté par l’étroitesse de ceux qui croient adopter le droit chemin interpelle son époque sur ses valeurs morales uniquement. Et ceux qui ont fondé le libéralisme authentique, pourtant moteur du progrès social, étaient bien dans la droite ligne de cette approche infusée de morale.
Pourtant, même si les chiffres ne peuvent être donnés en matière de vote communautaire, nous savons bien que le vote à droite est devenu une spécificité juive, explicable par la lâcheté coupable d’une gauche à la recherche d’un électorat sub-urbain, par une forme d’insécurité née du laxisme de la gauche sociale, par l’antisémitisme, à peine voilé, d’opportunistes qui ont trahi la morale de la gauche, de Roland Dumas à Jean-Luc Mélenchon ou tout récemment Julien Bayou…
A l’évidence, un tel revirement, incontournable ces vingt dernières années, est parfaitement compréhensible. J’entends qu’on ne retrouve pas la morale d’Isaie dans les meetings de la France Insoumise. Mais l’entend-on pour autant à l’autre extrême du spectre politique ? Posez vous la question, ceux qui sont tentés de voter pour les descendants respectabilisés de Drumont, des Croix de feu, de la Milice, et des nervis du GUD. Ceux, d’entre nous, qui se disent que l’ordre peut revenir en France sur la base d’un tel patrimoine idéologique, celui de l’intransigeance rêvée en matière d’immigration, de l’armée survoltée, et du délit de sale gueule, devraient réfléchir.
Le chaos d’une telle élection, chaos probablement irréversible, aboutirait sans le moindre doute à l’éternel retour du bouc émissaire. Ne soyons pas les sacrifiés, les abusés, ne cédons pas à la tentation de ceux qui se sentent menacés et se vouent à importe quel sein. Soyons de ceux qui offrent des sacrifices et savent que c’est envers autrui, pour ce qu’il a d’humain, que nous portent nos devoirs les plus sacrés.
Ariel Wizman
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