A première vue, ce n'est qu'une résolution anti-israélienne de plus. Sauf que dans sa décision adoptée le 27 mai, le Conseil des droits de l'homme a mis toute sa puissance de feu. D'abord, cette commission d'enquête internationale sera permanente. C'est une première. Si elle s'est fixé une date de départ : le 13 avril 2021, début des émeutes du mois de Ramadan, qui ont entrainé l'opération de Tsahal contre le Hamas, elle donc n'a pas fixé de date de fin.
Ensuite, son domaine géographique : il comprend non seulement les territoires palestiniens occupés, selon la formulation connue, mais aussi Jérusalem-est et surtout, pour la première fois : Israël. Ce qui signifie qu'il ne s'agit plus seulement de passer au crible les opérations militaires, mais aussi le fonctionnement de la société et des institutions israéliennes, à l'égard, bien entendu de la minorité arabe israélienne.
Enfin, rien de nouveau, en revanche, sur l'objet de l'enquête du Conseil des droits de l'homme : il s'agit bien entendu d'enquêter sur toutes les violations présumées des droits de l'homme. Mais les deux critères précédents élargissent évidemment l'angle de travail de la commission, qui enquêtera également sur "les causes profondes des tensions récurrentes, de l'instabilité et de la prolongation du conflit, y compris la discrimination et la répression systématiques fondées sur l'appartenance nationale, ethnique, raciale ou religieuse". Comme d'habitude, la condamnation est déjà dans l'énoncé.
Concrètement, cette commission d'enquête internationale permanente n'a que peu de pouvoirs. Elle ne peut pas forcer l'Etat d'Israël à coopérer et ses décisions n'ont qu'une valeur déclarative. Ce qui n'annule pas pour autant sa capacité de nuisance. La commission peut convoquer des témoins, elle peut appuyer ses conclusions sur toutes sortes d'éléments disponibles, déclarations politiques, rapports d'ONG, études académiques, voire des documents publics israéliens. Et surtout, elle peut transmettre le résultat de ses investigations à d'autres organisations internationales, comme par exemple la Cour Pénale Internationale, qui doit elle-même lancer une procédure contre Israël. Et sur la base du travail de cette commission d'enquête permanente, le Conseil des Droits de l'Homme de l'Onu peut aussi appeler les Etats à prendre des mesures de boycott ou de sanctions contre Israël. D'ailleurs, la résolution adoptée le 27 mai en donne déjà un avant-goût, puisqu'elle comprend un appel "à tous les Etats à s'abstenir de transférer des armes (…) lorsqu'ils évaluent qu'il existe un risque clair qu'elles puissent être utilisées pour commettre ou faciliter de graves violations du droit international". Inutile de préciser que cette injonction ne visait pas vraiment à demander à l'Iran d'arrêter de livrer des roquettes au Hamas ou au Hezbollah.
La résolution, il faut le rappeler, a été initiée par la délégation palestinienne au Conseil de Genève et présentée par le Pakistan pour le compte de l'Organisation de la Coopération Islamique. Plusieurs Etats européens dont la France, se sont abstenus, d'autres comme le Royaume Uni et l'Allemagne ont voté contre. Quant aux Etats-Unis, qui n'ont pas encore repris leur place au Conseil, ils en ont déploré la teneur. Mais c'est un nouveau pas vers la délégitimation d'Israël.
Pascale Zonszain
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