Yom HaShoah et corona

Israël.

Yom HaShoah et corona
(Crédit: Facebook Yad Vashem Jerusalem)

C'était il y a trois mois, c'était il y a un siècle. Le 23 janvier, plus de cinquante chefs d'Etat et de gouvernement venus du monde entier s'étaient réunis à Jérusalem pour marquer le 75e anniversaire de la libération des camps d'extermination nazis. Aujourd'hui, pour le Yom Hazikaron laShoah, le jour du souvenir de la Shoah, l'épidémie de coronavirus laisse les Israéliens seuls face à leur mémoire. Pas de cérémonie publique, pas de rassemblement, la sirène qui retentira tout à l'heure pour un hommage collectif aux six millions de victimes juives, ne figera que quelques rares passants dans les rues et résonnera encore plus durement pour les survivants, cloitrés seuls chez eux, loin de leur famille. Et plus encore pour ceux qui sont hospitalisés et se battent contre le virus. La cérémonie qui se tient chaque année au mémorial de Yad Vashem a été préenregistrée sans spectateurs. Les flammes du souvenir brulent seules. Pas de point de ralliement dans les rues ou devant les bâtiments publics pour venir prononcer à haute voix les noms des victimes.

Après la fête de Pessah célébrée dans le confinement, cette journée de commémoration prend elle aussi un caractère inédit. Jamais jusqu'ici, elle ne s'était déroulée dans de telles conditions. En Israël vivent aujourd'hui 189.000 survivants de la Shoah. Pour certains d'entre eux, la solitude et l'isolement sont le lot quotidien. Et c'est encore plus lourd à porter quand le confinement est général. Alors, pour tenter de briser cet isolement et de donner au moins un sentiment de collectif, de nombreuses initiatives ont germé sur les réseaux sociaux et dans les associations.

Il y a ceux qui participent à des rencontres virtuelles avec les survivants qui témoignent de leur expérience et qui dialoguent sur la plateforme Zoom. D'autres organisent des parrainages de jeunes et de bénévoles qui déposent sur le palier des survivants une plante et un petit drapeau d'Israël, juste pour leur dire qu'ils sont avec eux. Beaucoup ont également choisi de poster sur Facebook et d'autres plateformes, de courtes vidéos où ils récitent les noms des membres de leur famille qui ont péri dans la Shoah, ou même ceux de victimes dont ils ont trouvé l'identité sur le site de Yad Vashem. Tout le monde peut le faire, en utilisant les hashtags #RememberingFromHome et #ShoahNames. Ces vidéos seront ensuite collectées par le mémorial de Yad Vashem, qui les mettra en ligne sur son site. Car pour exister, la mémoire doit être exprimée, peu importe le support.

Mémoire, mais aussi solidarité. Et l'ironie du calendrier veut que le thème choisi cette année pour le Yom HaShoah,  soit celui du sauvetage des Juifs pendant la Shoah, et de la solidarité dans un monde en désintégration. Car en Israël, la mémoire de la Shoah s'est toujours accompagnée d'une célébration des actes de courage de tous ceux qui ont refusé de renoncer. Historiquement, c'était aussi une manière pour le mouvement sioniste de donner une dimension héroïque à la plus effroyable tragédie du peuple juif et de l'inscrire dans le mouvement de libération nationale, qui touchait déjà presque à la restauration de la souveraineté juive en Israël. Cette année, c'est la pandémie qui rappelle que pour sortir de l'épreuve, on a besoin plus que jamais de mémoire et de solidarité.

Pascale Zonszain

PZOOM210420

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