Selon une source israélienne citée jeudi par le New York Times, c'est Israël qui aurait conduit une frappe de drone cette semaine contre un centre de production de centrifugeuses dans la ville iranienne de Karaj. Comme à l'accoutumée, l'information n'a suscité aucun commentaire officiel côté israélien. Mais toujours selon le New York Times, l'usine de Karaj figurerait sur la liste de cibles qu'Israël avait fournie l'an dernier à l'administration Trump. Sur cette liste, on retrouvait aussi la centrale nucléaire de Natanz, visée par une mystérieuse explosion en avril dernier et le nom de Mokhsen Fakhrizadeh, le père du programme nucléaire militaire iranien, tué en novembre à Téhéran. On ignore encore l'étendue des dégâts subis par l'usine de Karaj, mais la coïncidence est en tout cas troublante.
Ce qui est intéressant, c'est que si effectivement il s'agit bien d'une action israélienne, ce serait la première depuis l'investiture du gouvernement Bennett et depuis l'entrée en fonctions du nouveau patron du Mossad, David Barnea. Dans ce cas, on assiste à une continuité de la politique menée par Benyamin Netanyahou, qui vise à retarder ou à faire reculer l'exécution du projet d'armement nucléaire de l'Iran.
Il y a en revanche plusieurs autres éléments à suivre et qui pourraient dévier de la ligne suivie par le précédent gouvernement israélien. D'abord, la question de la coordination avec les Etats-Unis. Il y a quelques jours, le nouveau ministre israélien des Affaires étrangères, Yaïr Lapid avait assuré que son gouvernement jouerait cartes sur tables avec l'administration américaine et qu'il n'y aurait jamais de surprise, autrement dit d'opérations lancées sans en avoir préalablement informé Washington. Un engagement que Benyamin Netanyahou, désormais chef de l'opposition avait qualifié d'irresponsable.
Ensuite, il y a aussi la question de la communication entre Jérusalem et Washington sur les négociations en cours à Vienne pour le renouvellement de l'accord des grandes puissances avec l'Iran. Israël n'est pas concerné par cet accord et continue donc à ne considérer que ses seuls intérêts stratégiques. Mais là où le gouvernement israélien précédent ne voulait même pas discuter des détails des pourparlers, le gouvernement Bennett-Lapid semble préférer une reprise du dialogue avec l'administration Biden. C'est notamment ce qu'a fait le chef d'état-major de Tsahal, qui achève une visite de six jours dans la capitale fédérale. Le général Aviv Kochavi s'est notamment entretenu avec le Secrétaire américain à la Défense, le Conseiller américain à la Sécurité Nationale et le patron de la CIA pour leur exposer la position et les recommandations israéliennes. D'abord qu'Israël continue à préparer son plan d'attaque contre les installations nucléaires de l'Iran qui sera mis à exécution si nécessaire, que les grandes puissances aient ou non renouvelé leur accord avec l'Iran. Ensuite, le chef d'état-major de Tsahal a rappelé les objections israéliennes sur le cadre de l'accord : son expiration prévue en 2030 est insuffisante et il faut une échéance beaucoup plus éloignée dans le temps. Et le contrôle des activités iraniennes par l'Agence Internationale à l'Energie Atomique ne suffira pas à prévenir des violations de l'accord par le régime de Téhéran.
Pascale Zonszain
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.