Le Premier ministre israélien a longuement réfléchi avant de choisir le nouveau directeur des services de la sécurité intérieure. Il faut dire qu'avec le chef d'état-major de Tsahal et le directeur du Mossad, celui du Shin Beth est un des personnages clés du dispositif sécuritaire d'Israël. Le choix s'est opéré entre deux hauts responsables du Shin Beth, que l'on désigne aussi en Israël sous l'acronyme Shabak, initiales de services de sécurité générale. Celui que l'on ne peut encore désigner que par son initiale "R", est âgé de 55 ans, c'est un ancien de l'unité Matkal, qui a fait toute sa carrière dans le service. C'est seulement à son entrée en fonctions le mois prochain, que son identité sera rendue publique.
"R" succède donc à Nadav Argaman, qui dirige le Shin Beth depuis 2016. Pour le nouveau patron du Shabak, l'expérience du terrain et de l'organisation sera évidemment un atout. Son profil est d'ailleurs assez proche de celui du directeur sortant. R a été l'un des responsables de la lutte antiterroriste du service au moment de la Seconde intifada, au début des années 2000.
Il va trouver un contexte compliqué, dont une partie lui est familière : celle évidemment de la lutte contre le terrorisme. Le rôle du Shin Beth est fondamental pour la collecte d'informations sur le terrain, la traque et l'arrestation des terroristes et la prévention des attaques, plusieurs centaines déjouées chaque année. Le Hamas tente de se restructurer en Cisjordanie où il cherche aussi à affaiblir le pouvoir de Mahmoud Abbas. Et l'organisation islamiste palestinienne alimente aussi la tension sur le front de Gaza. Sur ces deux secteurs, le Shin Beth sait comment opérer, on a encore vu le rôle joué par ses agents à l'intérieur de Gaza, pendant l'opération Gardien des Murailles en mai dernier.
Mais le nouveau patron du Shabak va devoir aussi s'investir dans deux domaines supplémentaires. Celui de la cyberdéfense, où il est déjà actif parallèlement aux unités spécialisées de Tsahal et à la Direction Nationale cybernétique. Mais le Shin Beth va devoir renforcer cette activité qui est de son ressort puisqu'il s'agit de la sécurité du territoire, que ce soit contre le cyber terrorisme d'organisations ou d'Etats hostiles comme l'Iran, mais aussi d'espionnage, par exemple de pays comme la Chine, voire d'entreprises ou d'acteurs économiques hostiles.
Et il y a un troisième front : celui de la criminalité dans le secteur arabe israélien. Jusqu'à présent, le Shin Beth a refusé d'y entrer, considérant que cela relève de la compétence de la police nationale. Mais la violence y a atteint une telle intensité – plus de 80 personnes tuées depuis le début de l'année – que seul le Shin Beth est équipé et formé pour y traquer l'information et les acteurs de ce que le président Herzog a d'ailleurs appelé hier du "terrorisme civil". Le nouveau patron du Shin Beth n'a plus vraiment le choix, d'autant que même des députés arabes israéliens réclament son intervention. Car il en va désormais de la sécurité intérieure d'Israël, le cœur de la mission du Shin Beth.
Pascale Zonszain
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