Le blues des gardiens de prison israéliens

Israël.

Le blues des gardiens de prison israéliens
(Crédit: service pénitentiaire israélien)

Depuis lundi, les Israéliens découvrent avec stupeur les négligences en série qui ont permis à six détenus palestiniens de haute sécurité de s'évader de la prison Gilboa. Ainsi, l'administration pénitentiaire israélienne est confrontée à l'érosion de sa dissuasion. Comme Tsahal sur le front de Gaza, les surveillants pénitentiaires doivent choisir entre la stricte application des consignes et le maintien du calme. Cela fait apparemment plusieurs années qu'ils ont opté pour la deuxième formule. Et pour maintenir le calme, c'est simple : il suffit de ne pas bouleverser la routine des détenus. Et cela commence par leur sédentarité. Une des méthodes pour prévenir la création d'organisations à l'intérieur de la prison et aussi toute tentative d'évasion consiste à déplacer les détenus d'une cellule à l'autre, ou d'un bâtiment à l'autre, de manière tout à fait aléatoire. Ça ne vaut pas la peine de commencer à creuser un tunnel quand on sait qu'on risque de déménager à tout moment. Seulement, les détenus ne se laissent plus déplacer sans réagir. Une inspection ou un transfert peut suffire à déclencher une mutinerie. Alors, pour être tranquille, l'administration pénitentiaire préfère renoncer. Et puis il y a toujours la crainte d'une agression ou d'une prise d'otage de surveillants et pour les éviter, on s'abstient de faire trop d'inspection en règle des cellules. Ce qui vaut aussi pour la contrebande de téléphones cellulaires. Beaucoup de détenus sécuritaires en disposent alors que leur usage est censé être interdit ou en tout cas limité. Et le brouillage n'est pas plus dissuasif, puisqu'il risque là encore de déclencher des émeutes. Donc, dans plusieurs prisons, dont celle de Gilboa, on y a renoncé.

En outre, les détenus sécuritaires palestiniens sont parfaitement hiérarchisés. Chaque faction, Fatah, Jihad ou Hamas, a son responsable, lui-même soumis à la chaine de commandement de son organisation, qui dispose d'un état-major en prison, comme il en a un dans la Bande de Gaza ou en exil. D'un côté, cela permet à la direction pénitentiaire d'avoir des interlocuteurs, dont elle sait qu'ils feront respecter les consignes, mais de l'autre, cela veut dire aussi qu'elle est en face d'une véritable force politique. On a d'ailleurs déjà vu par le passé des actions coordonnées entre des émeutes sur le terrain contre des soldats de Tsahal et des actions, par exemple de type grève de la faim dans les prisons, les unes stimulant les autres.

Dans l'affaire de l'évasion de Gilboa, ce n'est donc pas la chance qui a permis aux détenus de préparer tranquillement leur évasion et de creuser leur tunnel en sachant qu'ils ne seraient pas dérangés. Reste que la démotivation des surveillants pénitentiaires s'est apparemment étendue à d'autres négligences. Quand les premiers appels de témoins intrigués par la circulation de six hommes au milieu de la nuit sont arrivés au standard de la police, il a été impossible de vérifier auprès du centre Gilboa s'il s'était passé quelque chose. Le secrétariat de la prison avait oublié d'alerter la station de police voisine qu'elle avait changé de numéro de téléphone. Dans ces conditions, les terroristes n'ont aucun mérite. Même les Dalton auraient réussi à s'évader.

Pascale Zonszain

pzoom100921

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