C’est probablement la loi des séries ou peut-être le soulagement post-Covid. La goutte est bien souvent une maladie de la fête et des excès… mais pas uniquement.
C’est une maladie déclenchée par l’accumulation de cristaux d'acide urique dans les articulations du fait de son augmentation dans le sang. Ces dépôts de cristaux d’urate provoquent une inflammation très douloureuse. Et cette hyperuricémie peut également être responsable d’une CN.
L'acide urique provient de la dégradation des noyaux des cellules contenues dans les aliments principalement d’origine animale. Cette substance est habituellement éliminée par les reins. Mais en excès, elle peut nous l’avons vu se déposer dans les articulations ou déclencher un calcul rénal.
La goutte touche environ 1% de la population française, presqu’exclusivement des hommes entre 50 et 60 ans, volontiers obèses et bons vivants. Cette maladie est souvent familiale mais des excès de bonne chère, des médicaments, l’aspirine, certains anti-hypertenseurs, des diurétiques… peuvent élever le taux d’acide urique et la déclencher.
Le malade est typiquement réveillé au milieu de la nuit par une douleur soudaine au gros orteil. Souvenons-nous des gravures de Daumier avec un monsieur corpulent, rougeaud, bonnet de nuit enfoncé sur la tête, cloué au lit, jambe allongée, tant le profil est évocateur et la douleur intense et aggravée par le moindre mouvement. Mais il arrive également que le patient soit de corpulence normale et que d’autres articulations soient touchées : doigt, coude, genou ou cheville. L’articulation est chaude, rouge, enflée et extrêmement douloureuse. La crise peut s’arrêter spontanément au bout de quelques jours mais c’est rare, plus souvent résolutive sous l’effet du traitement. Le diagnostic est confirmé par un dosage de l’uricémie et éventuellement une échographie.
Les complications de la goutte sont de 2 ordres : - Locales : les articulations peuvent se déformer en raison de l’arthropathie uratique ou goutteuse ; - Rénales : une colique néphrétique à base d’urate peut survenir. Pour cette raison, les personnes qui font une crise de goutte doivent être explorées et surveillées régulièrement afin de dépister ces éventuelles complications et une récidive.
On peut prévenir une crise de goutte par des mesures d’abord alimentaires, les épisodes faisant souvent suite à des abus alimentaires, bien arrosés : les abats, la charcuterie, les fruits de mer, le gibier, les poissons gras (hareng, maquereau, sardine, saumon, thon), les viandes et volailles, et certains légumes comme les asperges, les champignons, le chou-fleur les épinards, les lentilles, l’oseille, la rhubarbe… sont souvent en cause, surtout s’ils sont accompagnés de bons vins tanniques ou d’alcools forts.
La crise se soulage principalement par la colchicine, le colchique dans les prés de la célèbre comptine, et/ou des médicaments anti-inflammatoires (AINS ou, éventuellement, corticoïdes). Parfois, les deux familles de médicaments sont associées. Et il peut être utile d’y ajouter un litre et demi à 2 litres d'eau ou d’eau de Vichy, par jour pour favoriser l’élimination de l'acide urique.
Pour éviter les récidives il faut une bonne hygiène de vie bien sûr. Un médicament, l’allopurinol, (Zyloric° et ses génériques) constitue le traitement de fond puisqu’il est urico-éliminateur, c’est à dire qu’il élimine l’acide urique en excès. Il empêche les récidives et permet de vivre normalement… avec quelques petits écarts de temps à autre. Il nécessite toutefois des précautions au moment où il est institué, pour ne pas (re)déclencher une crise.
La crise de goutte est pour nous médecins un incident certes fort douloureux mais relativement banal, facile à traiter et souvent à prévenir. On dit qu’une petite goutte d’eau peut faire déborder le vase. Ce qui est sûr, c’est qu’une grosse goutte d’alcool ou un excès alimentaire peuvent déclencher une crise. La prévention de la goutte, c’est quelque part l’école non pas des fans mais de la tempérance.
Docteur Serge Rafal
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