Entre Facebook et Israël, c'est une vieille histoire. Il faut remonter à l'automne 2015 et à la vague d'attentats à l'arme blanche qui avait frappé le pays. Des attaques perpétrées par des terroristes palestiniens isolés, mais qui trouvaient déjà leur inspiration dans la propagande et l'apologie de la violence contre Israël qui circulaient sur les réseaux sociaux. Le gouvernement israélien s'adresse alors à la direction de Facebook pour l'alerter sur la gravité du phénomène. Il faudra près de deux ans de négociations avec la société américaine pour qu'elle accepte finalement d'installer sur sa plateforme un système de signalisation de contenus d'incitation au terrorisme, comme elle le faisait déjà pour les contenus pornographiques ou pédophiles. Et en Israël, Facebook n'est pas comme aux Etats-Unis, protégée par l'exemption de responsabilité sur le contenu diffusé par ses utilisateurs. Mais c'est toujours la société qui garde le contrôle sur le maintien ou le retrait d'un contenu qui porte atteinte à une personne, sans avoir à s'expliquer sur sa méthode.
Israël n'est pas le seul Etat qui commence à s'inquiéter sérieusement des dommages causés par les abus constatés sur Facebook , qu'il s'agisse de diffusion de fake news, d'atteinte à la vie privée, sans parler des ravages auprès des adolescents et des troubles psychologiques graves provoqués chez les plus vulnérables. Le ministre de la Communication Yoaz Hendel a donc décidé de former un comité de sages qui sera chargé d'étudier tous les aspects du fonctionnement de Facebook et de ses effets et de proposer une série de recommandations dont certaines seront retenues pour faire l'objet de textes de lois. Parmi les experts pressentis, on retrouve des spécialistes du net et de la communication, mais aussi des juristes et même un philosophe. Il s'agira d'envisager les aspects légaux, techniques, mais aussi éthiques liés à l'usage des réseaux sociaux et les moyens de limiter leur impunité et de les obliger à plus de transparence.
Pas question pour autant de bloquer l'accès aux réseaux sociaux, qui font désormais partie intégrante du paysage médiatique et du tissu social. En Israël, il faut savoir que l'usage de ces plateformes est quasiment devenu le premier moyen de communication. Les Israéliens sont plus de 90% à utiliser WhatsApp au moins deux fois par jour, ils sont 85% à avoir l'application Facebook sur leur téléphone et 76% à avoir un compte Instagram. La récente panne mondiale de Facebook et de WhatsApp avait d'ailleurs été particulièrement ressentie en Israël.
Il va donc falloir trouver un moyen terme entre un meilleur contrôle du contenu diffusé pour empêcher les dérives et la préservation des libertés, à commencer par la liberté d'expression, qu'il n'est évidemment pas question de censurer. Si cela passe par un surcroit de régulation, il faudra aussi investir sur l'éducation, pour sensibiliser les plus jeunes à un code de conduite sur les réseaux sociaux. En Israël, on sait depuis longtemps qu'un post sur Facebook peut armer un terroriste. Aujourd'hui, il lui faut travailler sur tout le reste. Et une législation bien pensée pourrait inspirer d'autres pays qui cherchent eux aussi à protéger leur société des excès des géants de l'internet et de leurs plateformes de communication.
Pascale Zonszain
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