Midhat Salakh, qui a été abattu par des tirs de snipers, samedi près de la frontière israélienne sur le versant syrien du Golan, était apparemment un des maillons du dispositif que l'Iran continue de mettre en place pour installer des bases avancées contre Israël. Le Druze syrien avait déjà été condamné par la justice israélienne pour terrorisme dans les années 80, puis était passé en Syrie où il était devenu un représentant du régime d'Assad sur le Golan. Ce qui veut dire que son rôle consistait à faire remonter vers Damas des informations sur la population druze du côté israélien, mais qu'il émargeait depuis aussi auprès de l'Iran.
Il faut rappeler que le plateau du Golan, conquis par Israël en 1967, abrite aussi une population druze, qui contrairement à celle qui vit dans les frontières de 1948, n'a pas voulu prendre la citoyenneté israélienne, à quelques exceptions près. Les relations de la communauté druze du Golan israéliens avec ses voisins syriens ne s'est jamais interrompue, d'autant qu'il s'agit souvent de membres de mêmes familles, séparés par la frontière. Et quand la guerre civile a éclaté en Syrie, on a vu des Druzes du Golan demander à Israël de fournir une aide humanitaire à leurs parents de l'autre côté de la frontière, quand leurs villages se sont retrouvés attaqués par les rebelles sunnites. De même que des Druzes du Golan ont parfois attaqué des ambulances israéliennes qui descendaient des civils syriens exfiltrés pour être soignés dans des hôpitaux du nord d'Israël.
Cette situation compliquée est un des éléments exploités par l'Iran, qui utilise à son profit la fidélité des Druzes au régime de Bashar el Assad, tout au long du conflit civil. On avait vu il y a quelques mois des bergers druzes s'infiltrer en territoire israélien, certains sans armes, ou précédant des miliciens chargés de déposer des charges piégées sur la clôture frontalière. Ces infiltrations avaient été détectées, mais avaient permis aux éléments pro-iraniens présents du côté syrien de tester la réactivité et les vulnérabilités du dispositif de défense israélien.
Car pour Israël, la vigilance doit s'exercer à tous les niveaux. Il faut prévenir des attaques ponctuelles sur la frontière, mais aussi enrayer des acheminements d'armes vers les milices pro-iraniennes et en particulier le Hezbollah, mais aussi repousser l'Iran le plus loin possible de la frontière. C'est ce qu'ont permis les opérations conduites depuis près de cinq ans, avec un redéploiement iranien vers la frontière irakienne, où des raids attribués à l'aviation de Tsahal ont également eu lieu. Mais Israël sait que le régime de Téhéran continue à entrainer et à équiper des milices, qui le moment venu, devront servir de première vague d'attaque contre Israël sur le Golan. Des batteries Dôme de Fer, équipées aussi contre des attaques de drones ont été récemment déployées dans le nord d'Israël.
C'est pourquoi il est vital pour Israël de conserver sa liberté de manœuvre en Syrie, et pour cela, il lui faut pouvoir opérer sans craindre l'obstruction de la Russie, qui contrôle depuis six ans l'espace aérien syrien, à la demande d'Assad. Jusqu'à présent, le Kremlin laisse Tsahal conduire ses attaques tant qu'elles ne visent que des intérêts iraniens et ne mettent pas en danger le régime de Bashar el Assad. C'est la poursuite de ce compromis que Naftali Bennett veut obtenir et qu'il redemandera à Vladimir Poutine lors de leur première rencontre, prévue à la fin de la semaine.
Pascale Zonszain
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