La suite des témoignages de la police belge nous aura éclairé sur les dysfonctionnements de l’enquête et pas des moindres. "Ses proches ont admis qu'il visionnait des vidéos de l'État islamique dans son café et qu'il avait des contacts avec Abdelhamid Abaaoud". Toujours en visioconférence, un enquêteur belge a donc retracé le parcours de Brahim Abdeslam , l'un des quatre frères de Salah Abdeslam, seul survivant des commandos de terroristes du 13 novembre 2015. Brahim était membre du trio de terroristes ayant mitraillé des terrasses de l'est de Paris à partir de 21h25.»
C’est à bord d'une Seat noire, réservée par Brahim Abdeslam que les terroristes ont fait 39 morts et des dizaines de blessés en l'espace d'une quinzaine de minutes. Juste après ces attaques, Brahim Abdeslam a été déposé près de la place de la Nation. À 21h41, il a déclenché sa ceinture explosive dans un bar, «Le Comptoir Voltaire». Par chance, seule une partie de la charge - remplie de centaines d'écrous et de boulons -, a explosé. Le djihadiste a été le seul à mourir mais a blessé une quinzaine de personnes.
Un café où l’on vend de la drogue et on se "pique" à l’islam radical
L’ enquêteur nous explique que Brahim Abdeslam regardait des vidéos de propagande de l'État islamique sur l'ordinateur du café. Ces vidéos, dont certaines d'exécutions, auraient été visionnées le soir en compagnie de Salah Abdeslam, Mohammed Amri, Ali Oulkadi, Mohamed Abrini, Ahmed Dahmani ou encore Hamza Attou.
Café conspiratif ! Dans un message Facebook de juillet 2014, qui ne sera découvert par les services belges après les faits, le discours de Brahim Abdeslam se durcit : il explique qu'il faut "aller aider les gens en Syrie et que la Belgique est un pays de mécréants. Il vante aussi les attentats suicides, estimant que c'est «un suicide pour Dieu".
Brahim a hélas facilement berné la police Belge.
Le 27 janvier 2015 Brahim Abdeslam a contacté son frère Salah pour lui dire qu'il va franchir la frontière turco-syrienne. Il est finalement de retour le 7 février 2015 à Bruxelles. Il sera arrêté quelques jours plus tard par la police de Bruxelles, le 16 février, pour excès de vitesse.
"Je suis croyant mais je fume du shit …J’ai déjà eu des idées radicales mais ce n'est pas ça l'islam", explique-t-il. Brahim Abdeslam a réponse à tout. «Avez-vous de la sympathie pour les combattants de l'État islamique ?», l'interrogent les policiers. «Aucune, ce ne sont pas des musulmans», répond Brahim Abdeslam. "Que pensez-vous du djihad ?", le questionnent les enquêteurs. "Le djihad, c'est le bon comportement. C'est se combattre soi-même et se retenir de faire des mauvaises actions."
Le «dossier Brahim Abdeslam» reste au niveau de la police locale et n'est pas confié aux services antiterroristes, selon l'enquêteur belge auditionné ce vendredi. Le téléphone portable de Brahim Abdeslam n'est même pas exploité. Brahim Abdeslam ne fait plus parler de lui. «Ses voyages incessants vers le Maroc lui permettaient d'échapper à tout contrôle policier», explique l'enquêteur belge. Brahim Abdeslam est retrouvé mort le 13 novembre 2015 après s'être fait exploser au bar «Le Comptoir Voltaire».
L'avocate de Salah Abdeslam, Me Olivia Ronen, a notamment évoqué la conversation Facebook de juillet 2014 entre Abdelhamid Abaaoud, alors en Syrie, et Brahim Abdeslam, restée à Molenbeek. Dans cette conversation, il est question de djihad et de «déchirer des kouffars» (des mécréants, NDLR). «Et si le téléphone de Brahim Abdeslam avait été analysé dès février 2015 lors de son interpellation ?», questionne-t-elle. «Si cette conversation avait été exploitée à l'époque, la décision du magistrat aurait été différente»,
"On l’avait sous la main, on avait sur un plateau d’argent, et on a pas réussi à en faire quelque chose", admet enfin l’enquêteur.
Michel Zerbib
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