Notre journaliste a pu se rendre à Auschwitz jeudi 9 décembre avec une délégation emmenée par le Grand Rabbin de France Haïm Korsia. Récit.
Départ jeudi 7h du matin de Roissy et retour à 23h30, 180 personnes à bord du vol Air France. Un voyage organisé par le Grand Rabbin de France, accompagné pour la première fois par le président du Consistoire de France Elie Korchia avec des élèves venus de différentes écoles, de la 3ème à la Terminale. On embarque tous et on atterri 2h30 plus tard. Alexis, lycéen, est venu à Auschwitz pour « comprendre ce qui s’est réellement passé. On nous en parle depuis le collège, on voit des films, on lit des livres sur le sujet, mais je pense que c’est le seul endroit où l’on peut vraiment comprendre », a-t-il expliqué.
Auschwitz c’est un endroit difficilement lisible, car à l’intérieur il y a une multitude de camps indépendants. Celui où se trouve le centre de mise à mort, où les juifs arrivent et sont directement assassinés est à Birkenau, donc à 3km des lieux qui sont ceux qu’on connait le mieux : ces baraquements en brique rouge avec devant chaque porte un numéro de bloc. Là où sont envoyés en réalité ceux qui sont destinés au travail. Mais ce sont ces bâtiments, où sont exposées les traces de la disparition, de l’anéantissement des juifs, les photos, les kilomètres de chaussures des déportés assassinés, les valises, les cheveux qui étaient rasés à l’arrivée par les nazis.
Tout ce qui témoigne de cela ne pouvait pas être exposé sur les lieux même de Birkenau, où les baraquements sont pour la plupart en bois, et laissent passer le froid, l’humidité, là où l’on mourrait le plus. Là où les nazis ont détruit les juifs, mais aussi d’autres déportés comme les tziganes. Là où on éprouve le plus la disparition, c’est donc là où elle n’a pas eu lieu précisément, puisque le lieu d’assassinat était à Birkenau, et pas à Auschwitz.
Il y a aussi ce qu’il se passe dans son propre corps, le froid. C’est la seule sensation de ceux qui s’y trouvaient qu’on parvient un temps soit peu à toucher du bout des doigts.
Actuellement il fait froid, très froid à Auschwitz. En Europe Centrale, tout est différent d’ici. Le ciel est plus bas, le soleil lorsqu’il arrive à percer les nuages ne réchauffe rien. Le froid transperce le plus chaud des manteaux et reste à l’intérieur du corps. Il irradie à l’intérieur des os des heures et des heures après. Cela peut sembler absurde, indécent même, mais déjà rien que pour cette raison, y aller procure plus de questions que de réponses parce qu’il semble impossible de survivre en un tel lieu. Elie Buzyn, lui, a pu y survivre. Entouré de jeunes lycéens, il a raconté « l’anecdote de l’infirmerie » dans laquelle il explique comment il a survécu grâce à l’action d’un « témoin de Jéhovah allemand qui était déporté parce qu’il refusait de faire le service militaire. Il était contre les nazis. Il m’a soigné, il s’est occupé de moi, toutes les trente minutes, il venait m’apporter une potion liquide. Je ne sais pas ce qu’il y avait dedans mais cela m’a guéri ».
Dans ce voyage aussi Pierre-François Veil, accompagné par ses enfants. Trois générations d’une même famille donc. « Ma fille n’était jamais venue, et là c’était l’occasion d’y être avec son grand-père, c’était important pour moi de l’accompagner », explique t-il la voix chargée d’émotion.
Alexandra Senigou
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