Depuis le 25 novembre et jusqu’à vendredi dernier plusieurs policiers belges ont témoigné par visioconférence et de manière anonyme. Les réponses qu’ils ont apportées sur la radicalisation des accusés, avant que ceux-ci ne commettent les attaques – période qui faisait l’objet de leurs dépositions -, n’auront pas été à la hauteur des attentes des avocats des parties civiles et de la défense.
Souvent ces policiers ont fourni des explications imprécises ou ne savaient pas répondre ou soit, renvoyaient la balle vers un autre enquêteur… Combien de fois a-t-on entendu les : "De mémoire…", "Je ne pourrai pas vous répondre…" "Il faudrait plutôt poser la question à…" Alors que d’autres enquêteurs français ainsi et une juge d’instruction belge étaient venus déposer de longues heures, en septembre, parlant parfois plus de quatre heures avec une grande précision et sans note. On attend, à juste titre, tellement de ce procès hors normes.
Lorsque les questions portaient sur les ratés des enquêtes ou le manque d’investigations concernant plusieurs accusés ou terroristes morts, ces policiers belges étaient mal à l’aise pour répondre.
Comment est il possible que les autorités belges aient, par exemple, accordé un passeport à Oussama Atar , le commanditaire présumé des attentats, alors qu’il avait déjà été condamné pour des actes terroristes et qu’il avait interdiction de quitter la Belgique ? Comment se fait-il que la fiche Schengen SIS-2, établie par les policiers belges, à la suite de l’audition de Salah Abdeslam, en février 2015, qui était alors soupçonné de vouloir partir en Syrie,n’ait pas permis son arrestation ? Il avait été contrôlé sur un péage de l’autoroute A2, le lendemain matin des attentats ? "À quoi servent finalement tous ces contrôles et fichiers ? On a développé une artillerie qui ne tire nulle part. C’est la ligne Maginot de la lutte antiterroriste" , avait déploré Me Chemla, avocat de nombreuses parties civiles.
Me Olivia Ronen, l’avocate vedette de Salah Abdeslam avait tourné en ridicule la perquisition effectuée par les policiers belges, en juin 2016, au café Les Béguines, à Molenbeek, tenu par les frères Abdeslam. C’est dans la cave de ce café qu’ils visionnaient, avec d’autres accusés, des vidéos de Daech. Et la police belge n’avait rien trouvé.
Le président de la cour d’assises, Jean-Louis Périès, ces derniers jours, ne posait plus aucune question aux enquêteurs.
Les critiques liées à ces témoignages ont beaucoup fait parler en Belgique à tel point que la police fédérale belge a renvoyé les journalistes vers le parquet fédéral belge qui n’a pas caché son agacement. Pour lui, ces policiers n’étaient pas les mieux placés pour répondre aux questions qu’on leur posait. Le Parquet soutient que les policiers belges ont mené un travail “considérable” pour enquêter sur les auteurs et complices des attentats du 13 novembre 2015. "80 % de l’enquête a été menée en Belgique. C’est ce travail qui a conduit les accusés dans le box, à Paris, et qui a permis de lever énormément de zones d’ombre. Les policiers ont déployé une énergie énorme. Mais si on leur pose des questions sur ce qui s’est passé avant les attentats, cela ne correspond pas à leur enquête et au travail qu’ils ont effectué."
Pour le porte-parole du parquet belge c’est plus la juge d’instruction qui possède une vision globale des événements. Les policiers, eux, connaissent les actes qu’ils ont menés. La réponse est surprenante dans la mesure ou les policiers belges qui ont effectivement mené quantité d’actes de procédure, sous la conduite de juges d’instruction et du parquet, se sont forcément intéressés au parcours des actuels accusés. Cela dit, la cour d’assises spéciale entendra à nouveau, la juge antiterroriste belge, Isabelle Panou, et des enquêteurs au début de l’année 2022.
C'est ce que l'on appelle une séquence manquée pour toutes les parties. Y compris pour les enquêteurs belges. A la suite de leurs témoignages devant la cour d’assises, a rapporté la presse de Bruxelles citant le Parquet .
Les belges sont d’ailleurs un peu fâchés autour d’une controverse pas acceptée. Le reproche qui leur a été fait autour du témoignage anonyme et par visioconférence des policiers belges, c’est ce que n’oublie pas le parquet fédéral belge.
Michel Zerbib
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